1163-1344 - Le long chantier d'une cathédrale exceptionnelle

Lorsqu’il ouvre le chantier de Notre-Dame, en 1163, Maurice de Sully n’est évêque de Paris que depuis trois ans. Il souhaite doter la capitale d’une cathédrale exceptionnelle. Sans doute est-il motivé par l’existence, à quelque distance, de la sublime basilique de Saint- Denis édifiée une vingtaine d’années auparavant sous la direction de l’abbé Suger. Ayant choisi pour site la pointe amont de l’île de la Cité, il envisage une église longue de 120 mètres pour 40 mètres de large, avec une hauteur de voûte culminant à 33 mètres. De fait, jusqu’à la première moitié du xiiie siècle, Notre- Dame restera le plus vaste édifice religieux d’Occident. Mais au prix de quel chantier ! Le quartier épiscopal est chamboulé, le lit de la Seine lui-même est modifié, et une large voie est tracée pour acheminer les matériaux de construction. Les fondations doivent chercher leur appui dans une zone marécageuse où l’on trouve un sol stable à partir de 8 mètres de profondeur. De plus, afin de conserver à Paris un lieu de culte prestigieux malgré le chantier, l’édifice est bâti à l’arrière de la basilique Saint-Étienne, sa construction commençant par le chevet et le chœur. Les finances du royaume, plutôt prospère à l’époque, ont favorisé l’édification de Notre- Dame, tout comme la présence à Paris d’une importante main- d’œuvre qualifiée de tailleurs de pierre, charpentiers, sculpteurs, verriers... Et le chantier va vite ! Vingt ans après le début des travaux, la nef et le transept sont achevés. En 1208, les portails de la façade sont entièrement décorés et, en 1240, la verrière de la grande rose ouest reçoit ses vitraux. En 1250 se dressent les deux tours que relie une galerie. Enfin, la réalisation des arcs-boutants du chœur s’échelonne entre 1318 et 1344. Avant son achèvement, Notre-Dame accueille déjà de grands événements. En 1190, l’épouse de Philippe Auguste, la reine Isabelle, est inhumée dans le chœur de la cathédrale. En 1239, elle reçoit la couronne d’épines du Christ, précieuse relique acquise par Louis IX ! Enfin, c’est à Notre-Dame que Philippe IV le Bel réunit les premiers états généraux de l’histoire de France, en 1302.
10 avril 1302 - Philippe IV le Bel réunit les premiers États généraux

En ces premières années du xive siècle, Philippe le Bel entre en conflit avec le pape Boniface VIII, entendant exploiter à son seul profit l’imposition des églises situées dans son royaume. De son côté, le pape maintient que le pouvoir spirituel l’emporte sur le temporel ; l’Église de France doit donc se plier aux seules exigences de Rome. Soucieux d’obtenir l’adhésion de tous ses sujets dans cette lutte qui fait craindre à certains l’excommunication, le roi décide de réunir des représentants des trois ordres qui composent la société médiévale : le clergé, la noblesse et le tiers état. En choisissant Notre-Dame comme lieu d’assemblée, Philippe le Bel donne une dimension religieuse à une démarche on ne peut plus temporelle.
2 décembre 1804 - Le sacre de l'empereur Napoléon Ier

Sous l’Ancien Régime, les rois de France étaient sacrés par l’archevêque de Reims en sa cathédrale. En 1804, lorsque Napoléon Bonaparte s’autoproclame empereur, il décide de marquer une rupture définitive avec les temps passés. C’est donc la cathédrale Notre-Dame de Paris qui accueillera la cérémonie. Mais qui sacrera Napoléon Ier ? On pensait au pape Pie VII, invité à la cérémonie. Lorsque celui-ci s’apprête à couronner Napoléon, ce dernier le devance et sacre ensuite son épouse, Joséphine de Beauharnais.
1831 - Avec « Notre-Dame de Paris », Victor Hugo sauve la cathédrale

En s’octroyant le sacre impérial dans le chœur de Notre- Dame, Napoléon entendait donner un faste rare à la cérémonie. Avec la Révolution de 1789, la cathédrale était devenue un « temple de la Raison ». Pillée et vandalisée, non entretenue, elle approchait l’état de ruine, au point que pour donner un cadre acceptable au couronnement, il avait fallu construire un décor temporaire à l’aide de tentures et de châssis peints. Voici que le jeune Victor Hugo – il n’a alors que 28 ans – se lance dans l’écriture d’un roman historique dont l’action se déroule dans la cathédrale. Ce faisant, il se passionne pour l’édifice, tandis que son livre connaît un succès surprenant. Avec Notre-Dame de Paris, publié en 1831, Hugo communique sa passion au grand public, de telle sorte qu’une restauration ambitieuse de l’édifice est entreprise.
1843-1862 - la restauration de Viollet-le-Duc

Certains n’apprécient guère la restauration de Notre-Dame par Eugène Viollet-le-Duc. Les critiques sont d’une telle virulence qu’ils plongent même dans l’oubli Jean-Baptiste-Antoine Lassus, colauréat du concours d’attribution des travaux de restauration, décédé en 1857. Les puristes reprochent principalement à Viollet-le-Duc d’avoir inventé de toutes pièces certains ornements comme les gargouilles aux gueules monstrueuses. Ce faisant, ils oublient de louer les restaurations de la voûte, des arcs-boutants ainsi que le portail central et la galerie des rois, invisibles malgré la complexité de la tâche. On a beaucoup glosé sur la flèche, édifiée par ses soins en 1859. Fallait-il en construire une nouvelle sur son modèle, revenir au style de celle de 1250, ou en créer une à l’architecture inédite ? Le choix de reproduire à l’identique la flèche de Viollet-le-Duc et de Lassus signe la fin du débat.
26 août 1944 - le général de Gaulle entonne le «Magnificat» de la Libération

Journée inoubliable... Le 24 août 1944, l’entrée dans la capitale de la 2e division blindée du général Leclerc assure la victoire de l’insurrection déclenchée une semaine auparavant. Le lendemain, la reddition allemande est signée et, le 26, ouvrant un défilé colossal, les généraux de Gaulle et Leclerc descendent les Champs-Élysées puis se dirigent vers Notre-Dame de Paris où le Te Deum de la victoire doit être chanté. Lorsque le cortège atteint le parvis, une fusillade éclate. Malgré l’extrême confusion, le général entre dans la cathédrale où il entonne un Magnificat repris en chœur par la foule.
11 janvier 1996 - les obsèques du président François Mitterrand

Des funérailles grandioses ont été célébrées à Notre-Dame en hommage au président de la République française de 1981 à 1995. Une soixantaine de chefs d’État et de gouvernement réunis, dont Fidel Castro et Yasser Arafat, Helmut Kohl ou encore Shimon Peres, ne dissimulèrent pas leur émotion en écoutant Barbara Hendricks interpréter le Pie Jesu du Requiem de Fauré.
12 septembre 2008 - la visite du pape Benoît XVI
Trois ans après son élection au conclave de 2005, Benoît XVI se rend à Notre-Dame après une rencontre avec les personnalités de la culture au collège des Bernardins. Entourée de quelque 3 000 religieux et religieuses venus de toute l’Île-de-France, Sa Sainteté célèbre les vêpres puis s’adresse à une foule de jeunes réunis sur le parvis, en préambule à une veillée de prières qui se tient simultanément dans toutes les églises de France.
2013 - les 850 ans de Notre-Dame

La présentation de l’ensemble campanaire de nouvelles cloches et du nouveau bourdon, pour la tour nord de la cathédrale, fabriqués pour les 850 ans du vaisseau de pierre. Pour marquer ce jubilé, neuf nouvelles cloches sont fondues et mises en service : huit dans la tour nord où elles remplacent celles mises en place par Viollet-le-Duc, tandis qu’un nouveau bourdon baptisé « Marie » prend place dans le tour sud. Enfin, le grand orgue bénéficie d’une restauration ambitieuse.
15 novembre 2015 - À la suite des attentats, une messe à l’intention des victimes
Le dimanche 15 novembre 2015, la France est encore sous le choc après les attentats terroristes commis le vendredi 13 novembre. Les explosions au Stade de France à Saint-Denis, les mitraillades dans la salle du Bataclan et sur des terrasses des Xe et XIe arrondissements de Paris ont fait 130 morts et 413 blessés en moins de deux heures. Lors de cette messe, la cathédrale et son parvis sont envahis par une foule venue écouter des paroles de paix.
15 avril 2019 - à 18 h 18, le drame s’annonce

Ce lundi-là, pendant la messe vespérale, l’alarme incendie retentit, et nul ne soupçonne à quelle vitesse et avec quelle rage le feu embrase la charpente de la cathédrale. Une heure et demie plus tard, la flèche enflammée s’effondre en perçant la voûte. Devant ces images inoubliables qui font le tour du monde en quelques minutes, qui pourrait croire que Notre-Dame échappera à une destruction totale ? Premier « miracle » : il n’y a pas de victimes. Second « miracle » : cinq ans plus tard, la cathédrale, plus belle que jamais, est de nouveau ouverte aux fidèles et au public.