De l'Auvergne à l'Orléanais : la route Jacques-Coeur
Cap sur la route Jacques-Coeur à bord de votre véhicule, voiture, moto ou mieux encore votre camping-car. De l'Auvergne à l'Orléanais, cet itinéraire rend hommage à l'argentier du roi Charles VII. Il est jalonné de châteaux, de cités, de musées et d'une abbaye, tous témoins des riches heures de ce... Coeur de France. Un parcours historico-touristique à la croisée du Moyen Âge et de la Renaissance.
De Ainay-le-Vieil à Saint-Amand-Montrond, "la ville de l'or".
À l’extrême sud de la route Jacques Cœur et du département du Cher, dans ce paysage vallonné de bocage que vous découvrez au volant et qui juxtapose champs de céréales et prairies. Le château se dresse 2 kilomètres à l’écart de la D2144. Forteresse remarquable du XIVe siècle, elle enserre dans ses remparts aux neuf tours un splendide logis à tour d’honneur, de style « gothique tardif ». Souvent décrit comme un « petit Carcassonne », Ainay-le-Vieil appartient à la même famille depuis... 1467. Et qui était le propriétaire précédent ? Jacques Cœur ! La girouette du château d’Ainay indique le Nord. Cap alors sur Saint-Amand-Montrond, la « ville de l’or », située à 10 kilomètres. On s’aperçoit qu’elle n’y roule hélas plus beaucoup – sur l’or –, la crise ayant laissé des traces dans cette ancienne capitale de l’imprimerie. Saint-Amand reste pourtant une référence en matière de travail du métal jaune. Spécialisée dans l’or creux, elle abrite toujours quelques ateliers de bijouterie et des créateurs. Une histoire singulière à découvrir à la « Cité de l’Or », sous la pyramide de verre érigée à l’extérieur de la ville. 5 kilomètres plus loin, voici l’abbaye de Noirlac. Splendeur de l’art cistercien, elle déploie son architecture minimaliste de la fin du XIIe siècle.
De Bruère-Allichamps, centre officiel de la France, à Bourges
Que diriez-vous d’un petit crochet par le centre de la France ? Un roadtrip mérite bien un symbole. 3 kilomètres à l’est de l’abbaye, l’arrêt s’impose à Bruère-Allichamps, commune sans grâce mais officiellement reconnue comme le « centre géographique de la France », titre que lui disputent toutefois trois villages voisins... Après le château de Meillant et un passage à Dun-sur-Auron (joli beffroi), vous apercevrez depuis la champêtre D953 des villages recouverts de tuiles et rejoindrez peu à peu les faubourgs de Bourges. Il sera alors temps de stationner le véhicule (aire pour camping-cars au stade de Séraucourt) pour découvrir à pied la « patrie » de Jacques Cœur. Cette ville de prime abord austère et grise cache quelques joyaux, autour de la splendide cathédrale gothique Saint-Étienne (inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco). Premier d’entre eux, évidemment, le Palais Jacques-Cœur tout d’arabesques et de raffinement Renaissance. Bourges a d’autres atouts dans sa manche et surprendra notamment par son écheveau de ruelles médiévales, bordées de maisons à pans de bois ou à tourelles. Les plus remarquables se trouvent dans les rues Bourbonnoux, Jacques-Cœur et dans celle des Armuriers, ainsi que dans le petit quartier formé par les rues Montcenoux, Samson et Michelet. Une journée ne sera pas de trop pour visiter les « essentiels » de la ville.
Mehun-sur-Yèvre et sa tour rescapée
De nouveau sur la route, le détour par Mehun-sur-Yèvre se justifie. Dans cette petite ville située à 20 kilomètres au nord-ouest de Bourges – ne pas tenter de passer en véhicule sous la porte fortifiée, au risque que votre carrosserie en garde des traces... –, plane le souvenir de Charles VII. En direction du vignoble de Sancerrois, l’itinéraire rectiligne traverse des massifs boisés, prémices de la Sologne. Voilà que pointe ensuite l’immense château de Menetou-Salon, témoin de l’incommensurable richesse de Jacques Cœur. Le marchand l’acquiert au XVe siècle, grâce aux fortunes accumulées par son commerce avec l’Orient et aux bénéfices tirés de l’Argenterie royale, dont il est le maître. La demeure, agrandie au XIXe siècle dans un style néogothique, rappelle la façade du Palais Jacques Cœur. La propriété et son vignoble appartiennent aujourd’hui au prince d’Arenberg.
Sancerre, halte pour gourmets
À 30 kilomètres au nord-est, par la D955, Sancerre et ses blancs fruités pointent sur leur tertre le bout de leurs cépages. C’est l’occasion d’une halte gourmande dans l’une des caves ou restaurants de la ville (ou du charmant village de Chavignol). Depuis la D307, en direction de Ménétréol-sous-Sancerre : au sortir d’une épingle, vous trouverez un coin d’herbe pour garer le véhicule, avec un banc. Idéal pour profiter des ondulations de vignes épousant le relief, sur fond de village de Sancerre.
De Neuvy-deux-clochers à la Chapelle-d'Angillon
Passé le parc de Pesselières et son « jardin remarquable » (ouvert de mi-avril à fin octobre, sauf deux semaines en août), restauré avec passion par Pascal Fontanille (scénariste de la série Clem, sur TF1), empruntez – avec précaution – les départementales D59, D46 et D12, via Neuvy-Deux-Clochers, Morogues et Henrichemont (étonnant village en cœur étoilé, créé par Sully au XVIIe siècle). L’odeur de sous-bois et d’étangs typique de la Sologne a déjà imprégné votre odorat lorsque vous parvenez à La Chapelle-d’Angillon, où l’arrêt s’impose. Ce village-rue d’allure quelconque, coupé en deux par la D940, ne peut laisser insensible les fans de romans : c’est ici qu’est né Alain-Fournier, l’auteur du Grand Meaulnes, chef-d’œuvre de la littérature romantique française. Sa maison natale, très modeste, trône au bord de la route.
Aubigny-sur-Nère, la mémoire écossaise
Dans cette petite ville bordée de maisons à colombages, on est surpris d’apercevoir une cabine téléphonique made in England, devant l’église. À la mairie, des mannequins cartonnés en kilt sont posés dans le hall... Pure fantaisie ? Pas le moins du monde. Comme le château de La Verrerie, Aubigny échut dans l’escarcelle des Stuart, grâce à Charles VII. La ville ne fut rendue à la couronne de France qu’en 1673, après deux siècles et demi de « protectorat écossais ». Jumelée avec Haddington, en Écosse, Aubigny accueille chaque année des fêtes franco-écossaises. Et il paraît que des familles donnent encore des prénoms britanniques à leurs rejetons...
De la verrerie d'Oizon à la faïence de Gien
Il est pourtant un autre château qui soutient la comparaison : La Verrerie à Oizon à 12 kilomètres au nord de la Chapelle-d’Angillon, par la D926. Son architecture Renaissance surgit au milieu des bois, au bord d’un vaste étang. Jacques Cœur était-il dans le coup ? Pas cette fois. Le domaine a bien appartenu à Charles VII. Il l’offre aux Stuart, la famille royale écossaise. Ces derniers y font construire le château et n’auront de cesse de l’embellir. Oubliée par la suite, la demeure sera redécouverte en 1842 par Léonce de Vogüé. La famille détient toujours cette bâtisse et son domaine de 800 hectares. On découvre par la visite les beaux salons, la bibliothèque, la chapelle et la galerie à trophées de chasse, mêlant histoire écossaise et berrichonne. « Il arrive que l’été, nous voyions ici des hommes en kilt », sourit Ghyslaine, une des guides-conteuses de La Verrerie. Après Aubigny, l’air de la Loire approche. Voilà Argent-sur-Sauldre et son château-musée des Métiers et des Traditions de France. Puis Gien et sa faïence, première ville officielle de la route des châteaux de la Loire.