L'Ile aux Oiseaux : prenez-vous pour Robinson !
Posé au milieu du bassin d'Arcachon, il est un petit bout de terre singulier, célèbre pour ses cabanes tchanquées. D’accès difficile et très réglementé, l'île aux oiseaux ne se livre qu’avec parcimonie aux curieux ! Détours en France vous fait découvrir un tout petit bout de pays d’une superficie d’à peine 3km²... Mais croyez-nous, ils valent le coup d’œil.
La Silencieuse : un nom bien choisi pour la tillole électrique de Virgil Lauga, qui va nous conduire du port de La Teste à l’île aux Oiseaux. Quelle meilleure embarcation qu’un bateau non polluant et quasi muet pour découvrir cette île sauvage, classée site naturel protégé et mondialement connue pour ses deux cabanes tchanquées. Comme beaucoup, on peut en faire le tour lors d’une sortie avec les bateliers d’Arcachon. Mais accoster et poser le pied sur ce petit bout de terre relève de la sortie d'exception. Et pour cause : tout y est strictement réglementé, condition sine qua non pour protéger l’endroit des afflux touristiques, spécialement l’été en juillet et août.
Vigil Lauga : notre guide

Virgil Lauga, 06 06 67 45 55. pinasse-electrique.fr
Les cabanes tchanquées de l'île aux oiseaux
Perchées sur leurs échasses, chanca en gascon, elles sont les vedettes du bassin. Elles étaient autrefois habitées par les gardiens des parcs à huîtres. Il n’en reste aujourd’hui que deux : l’une, érigée en 1964, est privée. L’ autre,aux volets blancs, est gérée par la mairie de La Teste : construite en 1883, très endommagée par la tempête de 1999, elle a été entièrement démolie, puis rebâtie, morceau de bois par morceau de bois : azobé pour les pilotis, chêne pour le plancher, pin maritime pour les cloisons.
Le projet : en faire un espace muséographique sur le bassin et l’huître. Pour l’instant, elle ne se visite pas.
Sur l’île aux Oiseaux, il n’y a pas que les tchanquées, mais bien une cinquantaine de cabanes, anciennes baraques d’ostréiculteurs.
Un paysage à peine croyable
On savoure donc sa chance, en passant devant l’Aiguillon, le port d’Arcachon, où d’humbles cabanes font encore de la résistance devant des immeubles fleurant bon le XXIe siècle triomphant... La Silencieuse s’enfle maintenant dans le chenal du Teychan : carte à l’appui, Virgil nous indique le trajet suivi. Laissant le rivage d’Arcachon derrière nous, nous voilà dans le chenal du Courbey. Étape suivante : pénétrer dans l’estey d’Afrique. Un estey, c’est un petit chenal qui serpente entre les crassats, ces terres vaseuses émergentes à marée basse. Et l’Afrique? « L’Afrique, répond Virgil, c’est... pour le rêve. » Et c’est vrai que nos imaginations filent bon train, plus vite que La Silencieuse... L’île apparaît enfin, émergeant à peine au-dessus de l’eau.
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Une hymne à la vie sauvage
L’île se précise, plate, recouverte d’une végétation rase, d’où émerge de temps en temps un pin esseulé. Et surprise, une alignée de cabanes noires, toits rouges et volets bleus ou verts. Sur l’île aux Oiseaux, il n’y a pas que les tchanquées, mais bien une cinquantaine de cabanes, anciennes baraques d’ostréiculteurs, aujourd’hui louées suivant un règlement draconien à quelques privilégiés qui ont montré patte blanche. Elles sont regroupées en cinq hameaux, disséminés sur toute l’île. C’est le moment de débarquer les pieds dans l’eau. Le changement de marée laisse quelques heures de tranquillité. Il faut savoir qu’à marée haute, l’île perd les neuf dixièmes de sa surface, passant de 3 000 à 300 hectares.
Une île pour les affamés de nature
Le sable est moins blond qu’au Cap-Ferret, pas de plage de rêve, les rares pins qui arrivent à survivre ici ne se prennent pas pour des cocotiers. Pourtant, cet îlot improbable a tout d’un petit paradis pour les affamés de nature. Les cabanes sont pomponnées, mais avec le confort minimum, sans électricité, sans eau, hormis l’eau de pluie recueillie dans les gouttières et par un puits artésien : la présence de ce puits explique qu’au XIXe siècle, les habitants du bassin venaient ici faire paître quelques vaches et chevaux. L’évidence s’impose vite à nous : l’île aux Oiseaux, c’est un appel à la vie sauvage, la vie d’avant, d’avant la télé, les portables, le Wifi, Facebook et les tweets. Les seuls « twit » qui existent ici sont les cris d’une variété d’oiseaux que je n’identifie pas : il faut dire qu’on en a recensé 150 variétés, sédentaires, nicheurs, migrateurs...
Les cabanes sont fermées, ce coin d’île semble désert. On emprunte maintenant un sentier recouvert de pochons d’huîtres, qui serpente dans les vasières, au milieu des salicornes et des spartines. Ils sont entretenus par les chasseurs et font le tour de l’île, l’occasion d’une belle balade. Oui, la chasse est ici autorisée, notamment dans les lacs de tonne, ces petites retenues d’eau où se planquent quelques abris, quasi invisibles à l’œil nu. Le silence, habité par les cris d’oiseaux, le soleil à son zénith, qui nous caresse, l’envie soudaine que le reste du monde nous oublie : avec l’île aux Oiseaux, on se souvient qu’on a tous en nous quelque chose de Robinson.
Le règlement draconien
L’île aux Oiseaux a un statut particulier. La majeure partie du territoire relève du domaine public maritime, dont la gestion a été confiée par le Conservatoire du littoral à la commune de La Teste-de-Buch. Seule une partie au nord-ouest, en secteur non inondé, est privée. Les cabanes du domaine public sont louées pour une durée de sept ans. N’est pas locataire qui veut : il faut d’abord écrire une lettre de motivation à la mairie de La Teste, qui transmet les candidatures au Conservatoire du littoral. Ensuite, les heureux élus doivent s’engager à respecter le règlement général et à entretenir leur cabane. Pour eux comme pour les touristes, des interdictions strictes : pas de feux, pas de camping, pas de bivouac, pas de visites de groupes. Sont également proscrites sur l’île toutes les activités commerciales. Donc n’espérez pas y trouver un hébergement !