La seconde vie des viaducs des Côtes d'Armor
De nombreux ponts et viaducs traversent le très vallonné département des Côtes d'Armor. À l'abandon depuis la fin des années 50, ces ouvrages d'art sont tour à tour réhabilités pour le plus grand plaisir des promeneurs et des cyclistes.
Le réseau secondaire le plus important de France
Alors qu’au XIXe siècle la révolution ferroviaire est en marche dans toute la France, la Bretagne peine à y être intégrée. Ce n’est que 20 ans plus tard, en 1863, qu’une ligne Paris-Brest desservant Saint-Brieuc vit enfin le jour. Il faudra de nouveau 30 ans pour qu’un changement s’opère, qui bouleversera tout le département. C’est l’ingénieur Louis Harel de la Noé qui sera en charge de la construction des nombreux ponts et viaducs qui viendront habiller le paysage local, très vallonné et longtemps déclaré impraticable. Dès lors, les chemins de fer des Côtes-du-Nord deviennent, avec leurs 452 kilomètres, le plus grand réseau ferroviaire départemental de France !
La révolution Harel de La Noé
De son style qui lui est propre, Harel de la Noé révolutionne l’architecture par la finesse de ses réalisations capables de s’élever toujours plus haut. De 1901 à 1918, il est en effet le premier à utiliser le béton armé et les briques, dans un souci d’économie, qui valent aux nombreux encorbellements qui constituent ces ouvrages d’art l’appellation de « dentelles » de béton, tant la finition est raffinée. En aménageant de ses ponts et viaducs tout le département des Côtes-du-Nord, l’ingénieur briochin participe à désenclaver les villes côtières en proposant un tracé aux plus près du littoral, et participe ainsi au tourisme régional.
La Voie Métrique
Le réseau ferroviaire secondaire a été équipé principalement de voies métriques qui se singularisent par un écartement des voies plus petit (1 m au lieu de 1,435 m). Ce dernier permet de réaliser de nombreuses économies tant au niveau du matériel, plus léger, que des réalisations moins imposantes mais tout aussi impressionnantes de par leur finesse et leur élévation.
Les années 50 signent la fin du Petit Train
Durant près de 50 ans, celui que l’on nomme le « petit train des Côtes-du-Nord » sillonnera les 19 lignes qui constituent le réseau secondaire. Mais l’expansion du transport automobile, dès les années 1930, verra les chemins de fer accuser un fort déficit, causant progressivement la fermeture des différentes lignes, jusqu’en 1956.
Dès 1957, les voies sont progressivement déferrées et les ouvrages d’art sont laissés à l’abandon, faute d’entretien. Certains seront détruits car jugés trop dangereux mais nombre d’entre eux font aujourd’hui partie intégrante du paysage costarmoricain et trouvent pour quelques-uns une seconde jeunesse grâce au conseil départemental et à l’Association Harel de la Noé, cette dernière s’employant à protéger ce riche patrimoine depuis plus de 20 ans, notamment en inscrivant les ponts et viaducs aux Monuments Historiques.
La nouvelle vie des Ponts et Viaducs
La dernière décennie a vu une forte réhabilitation de certains de ces monuments suite à des travaux de sécurisation et de consolidation, et à leur intégration dans les circuits des Véloroutes et Voies Vertes de Bretagne. Ces édifices permettent aujourd’hui aux randonneurs et aux cyclistes d’emprunter l’ancien tracé de chemin de fer pour des balades en plein cœur de la nature.
Le premier à avoir subi une petite transformation est le Viaduc des Pourrhis situé sur la commune d’Etables-Sur-Mer, en 2007, que les promeneurs peuvent de nouveau emprunter depuis la pose de rembardes de sécurité, qui leur permettent désormais de profiter d’une pause en pleine verdure.
Les Véloroutes et Voies Vertes de Bretagne
Dans le cadre d’un vaste projet de dynamisation, la région trace de grands itinéraires adaptés à tous publics et connectés les uns aux autres, sécurisés et balisés sur un réseau de 8 itinéraires allant des chemins de halages en passant par les anciens chemins de fer abandonnés, sur plus de 1300 km pour découvrir la Bretagne côté nature !
Depuis, bien d’autres ouvrages d’art ont pu à leur tour être réhabilités et rénovés avec l’aide du Département des Côtes d’Armor et de la région Bretagne dans le cadre d’une promotion touristique visant à emmener les vacanciers sur des itinéraires adaptés à la circulation cycliste et piétonne et cela, en toute sécurité. C’est le cas du Viaduc du Parfonds de Gouët, en 2011, de la Passerelle de la Côtière en 2013 et du Viaduc des Ponts-Neufs, inauguré en 2014, qui incitent à découvrir le département autrement.
Riche d’un passé industriel important, les Côtes d’Armor réussissent à offrir un second souffle à ce patrimoine exceptionnel en l’intégrant aux nouvelles habitudes des usagers et en sensibilisant le public à l’histoire du département. Une jolie manière de continuer de faire vivre le Petit Train plus d’un siècle après son apparition révolutionnaire !