Première étape : de Maïdo à Roche-Plate 6 km – 1 070 m de dénivelé positif - 3 heures
La randonnée débute au parking situé à proximité de l’arrêt de bus destiné aux habitants de Mafate, qui eux ne se baladent pas mais tout simplement rentrent chez eux. On longe donc l’aplomb du cirque sur de larges dalles en basalte recouvertes de brandes et d’ajoncs en direction du nord, jusqu’au point où le sentier du rempart de Mafate croise celui de Roche-Plate, que nous allons suivre. Celui-ci s’accroche littéralement au rempart abrupt, avec pour le moment une pente raisonnable. Mieux vaut cependant s’économiser. Cela permettra d’apprécier le jeu des lumières, changeantes au gré des nuages qui jouent à cache-cache avec les crêtes montagneuses. Le cirque révèle progressivement les îlets qui parsèment les replats; ainsi les Orangers, Cayenne, Aurères... séparés par de grandes entailles d’érosion. La rivière des Galets qui rassemble les eaux de Mafate apparaît au creux de la vallée. Elle semble en même temps très proche et très lointaine puisque, au bout d’une heure de marche, la distance ne paraît guère avoir diminué. Après le point de vue qui domine Roche-Plate à 1783 mètres d’altitude, l’itinéraire devient plus pentu: les marches du sentier sont hautes et les bâtons trouvent toute leur utilité pour économiser les rotules. Alors que nous sommes en plein effort, en face, un traileur remonte en trottinant, tout sourire. Les Réunionnais montrent un fol engouement pour cette activité sportive, et il est vrai que les cirques offrent les plus grands spots de course de montagne au monde. Des compétitions sont organisées régulièrement, dont le fameux « Grand Raid », de réputation internationale, qui réunit chaque année près de 3000 Fous dans une grande Diagonale de 160 kilomètres. Au point de vue de la Brèche, le paysage s’ouvre sur un autre aspect de Mafate. Le fond du cirque révèle une géomorphologie atypique. La montagne semble déchiquetée, le sol, friable et asséché. Il ne reste que quelques cloisons résiduelles, disposées telles des ruines, sous forme de crêtes marquées de couloirs d’érosions. Et surtout, le replat qui mène maintenant à l’îlet de Roche-Plate permet aux jambes de se remettre de la longue descente. Une petite pause à l’épicerie du village, avant de rejoindre le gîte, apporte une détente en offrant toujours l’occasion de belles rencontres.
Randonnées avec de redoutables dénivelés
C’est une constante des grandes randonnées à travers les cirques réunionnais : ça monte, ça descend ; le plat est un luxe. Savoir marcher en s’économisant évite donc bien des peines. À la montée, ne jamais attaquer la pente de face ; bien suivre les lacets du sentier et d’un pas à l’autre, ne pas essayer de gagner plus de 15 cm de dénivelé. Faire des petits pas permet de conserver un bon rythme sans fatigue. Sur le plat, garder la même cadence qu’à la montée, mais allonger le pas ; on en profitera pour se détendre les muscles. À la descente, freiner fatigue mais courir massacre les articulations, les tendons et les muscles. Les bâtons sont alors très appréciables.
Seconde étape : de Roche-Plate à Marla 8 km – 700 m de dénivelé positif – 6 heures
L’itinéraire entre l’îlet de Roche-Plate et Marla se parcourt facilement en six heures, l’étape étant divisée en deux parties égales par le lieu-dit les Trois Roches. Les ambiances sont néanmoins très différentes: d’abord une montée régulière et douce au pied du rempart de Maïdo, qui offre par endroits des perspectives vertigineuses. C’est alors qu’on descend vers la rivière des Galets, dont on remonte le lit vers le fond du cirque de Mafate.
Galets et cristaux
On atteint ainsi le pied de la rude pente de l’îlet de Marla. On prendra donc le temps de faire la pause à Trois Roches et de boire une petite tisane Chez Bernard, le seul habitant à des kilomètres à la ronde. La rivière des Galets mérite bien son nom. Des galets, il y en a des tonnes, ponctués de cristaux. Pour le géologue, ce site est comme un livre ouvert sur l’histoire du Piton des Neiges qui nous domine de ses 3070 mètres, et dont les pentes sont mises à nu par les ruissellements. Pour se baigner dans la rivière, il faudra attendre les premiers bassins, au pied de Marla. À ce moment-là, comptez une heure sur une pente raide, pour rejoindre le centre de l’îlet. Marla pourrait servir de camp de base pour une randonnée à la journée: on découvrirait ainsi le plateau de Kerval (lieu de bivouac de nombreux randonneurs) et, de là, continuer jusqu’à la plaine des Tamarins où la rivière présente de superbes vasques turquoise. Et pourquoi pas, alors, pousser jusqu’à l’îlet de La Nouvelle et la Plaine aux Sables ?
Troisième étape : de Marla à Cilaos 7 km – 430 m de dénivelé positif et 1 080 m de dénivelé négatif – 5 heures
À Marla, au pied des Trois Salazes (2100 mètres) et du Grand Bénare (2896 mètres) on se trouve tout au fond du cirque de Mafate, le col du Taïbit, entre les deux sommets, donnant accès au cirque de Cilaos. Pour cela, il faut commencer l’étape par une ascension de 400 mètres. Au fur et à mesure qu’on s’élève, la vue porte de plus en plus loin sur le cirque et la rivière des Galets. Enfin au col, on mesure combien est étroite la crête qui sépare les deux caldeiras. Et surtout, on se découvre quasiment au-dessus de Cilaos. Mais ce n’est qu’une impression, car la descente, en pente bien plus douce que ce qu’on a connu entre Maïdo et Roche-Plate, paraît bien longue.
La Réunion sauvage
Du moins, elle laisse une grande disponibilité pour observer la nature. Sur les crêtes, rabougrie, la végétation arborée couvre en grande partie le sentier. Le cortège forestier change et, surtout, les branchages sont couverts des mousses qu’on appelle sphaignes. La présence de barbe de Saint-Antoine (Usnea barbata) signe une forte hausse de l’humidité. La composition végétale, influencée par la circulation des vents, se montre complètement différente de celle de Mafate. Plus bas, la forêt de pins qu’on traverse est une tentative d’exploitation forestière. L’îlet des Salazes est une belle transition après cette traversée d’un cirque à l’autre, avant de retrouver le réseau routier et la civilisation. Le sentier débouche en effet sur la route D242, qu’emprunte d’ailleurs le GR 1®. Mais on peut aussi rester sur un sentier qui domine la rivière et passe au pied de l’îlet Méon et la cascade du Bras-Rouge. Il serait dommage de quitter si vite les charmes de La Réunion sauvage.
Rude climat pour les randonneurs
À La Réunion, on randonne en montagne, et il faut en tenir compte. Ainsi, l’altitude : au Piton Maïdo, on se trouve à 2 200 mètres d’altitude mais à seulement 15 km de la mer ; cela suffit pour qu’on se sente le souffle un peu court en sortant du bus qui arrive droit de Saint-Paul. La température baisse de presque 1 °C tous les cent mètres d’altitude et, à calcul facile, conclusion facile : il ne fait pas chaud,et ceci d’autant moins que votre organisme est resté habitué aux températures du bord de mer. À cela s’ajoute l’humidité de l’air, toujours importante, et qui augmente les effets du chaud comme du froid.