Que faire à Langres?
Nous sommes fin juillet et un vent frisquet balaye le plateau de Langres, à près de 500 mètres d'altitude. Décidément, impossible d'échapper aux poncifs quand on évoque cette ville réputée glacée d'une Champagne pourtant officiellement… méridionale ! Mais il serait inconvenant de s'arrêter au cliché. Il peut faire beau et chaud à Langres. Et la ville mérite mieux que sa réputation, car elle est un bijou d'art militaire.
Faire le tour des fortifications

Tête de pont historique des royaumes de Bourgogne puis de France face aux ennemis venus de l'Est, cette cité des confins a assumé sans rechigner son rôle de ville-frontière. Comble de l'ironie, ses fortifications, bâties dès le IVe siècle, ne seront jamais assiégées. Renforcées au XIIIe-XIVe siècles puis au XIXe siècle, elles n'auront servi finalement que de barrière à la bise et aux frimas. La conséquence ? Une citadelle sans tâche, protégeant dans ses murs un noyau urbain inaltéré. Le tour des remparts par le chemin de ronde montre à quel point la cité s'est calfeutrée. De la tour d'artillerie Saint-Ferjeux de 1470 à celle de Saint-Jean édifiée vers 1538, en passant par la porte de l'Hôtel de ville et l'arc gallo-romain, les fortifications, étendues sur 3,5 kilomètres, forment une boucle parfaite et « imprenable ». À l'intérieur, elles protègent un lacis urbain où s'est épanouie une élite épiscopale et bourgeoise.
Dénicher les hôtels particuliers Renaissance

Autour de l'immense cathédrale Saint-Mammès, de style roman bourguignon inclinant vers le gothique, les maisons de chanoines et Renaissance fourmillent. Mention particulière à la maison Claude Bégat, splendide témoin du siècle, avec sa façade à colonnettes ioniques et corinthiennes. À l'intérieur se trouve un inédit studiolo, sublime cabinet particulier entièrement sculpté, récemment restauré. De ruelles en passages transversaux, dont celui, fameux, des Hallebardiers, l'itinéraire dévoile d'autres hôtels particuliers (rues Roussat, de la Tournelle…). Deux tiers des édifices de Langres ont été construits entre le XVIe et le XVIIIe siècle. Ils concourent à faire oublier le vernis un peu gris et austère d'une ville dont la fonction de verrou a fatalement engendré présence militaire et casernements.
Pourchasser le fantôme de Diderot

Et puis il y a Diderot. Le philosophe de Langres. Né en 1713, le penseur est un autre fil rouge pour qui parcourt la cité. Il est présent par sa maison natale, située… place Diderot, là où s'élève aussi sa statue, signée Bartholdi. Par l'ancien collège des Jésuites, où il fera ses premières Humanités, raflant des prix au point que son père, maître coutelier, en pleurera de fierté. Par la relation qui l'opposera à son frère honni, Didier-Pierre Diderot, chanoine à Langres, dont la maison trône en bordure de la place Jeanne-Mance, face à la cathédrale. Par les écrits sur sa ville : « les habitants de ce pays ont beaucoup d'esprit, trop de vivacité, une inconstance de girouettes ; cela vient, je crois, des vicissitudes de leur atmosphère, qui passe en vingt-quatre heures du froid au chaud, du calme à l'orage, du serein au pluvieux […]. Pour moi, je suis de mon pays ; […] »

Par, enfin, la visite incontournable de la Maison des Lumières Denis Diderot, musée dévoilant la vie et les écrits du philosophe. Oui, vraiment, ne pas s'arrêter aux contingences climatiques de Langres…
Infos pratiques
Tourisme en Haute-Marne. tourisme-hautemarne.com
Office de tourisme du Pays de Langres, square Olivier-Lahalle. Tél. : 03 25 87 67 67. tourisme-langres.com
Que faire dans le parc national de forêts ?
Mieux comprendre la biodiversité

Bienvenue dans le dernier-né des Parcs nationaux français. Création : 2019. Visibilité : encore limitée. Mais les choses devraient changer. Car non seulement ce Parc se structure mais il agrège aussi tous les enjeux liés à la biodiversité et à l'évolution de la forêt française sous l'effet du réchauffement climatique. Pour nous y conduire et en parler : Jean-Yves Goustiaux. C'est le directeur du Centre d'initiation à la Nature d'Auberive. Le but de cette structure, partenaire du Parc, est de transmettre auprès du grand public les thèmes liés à cet écosystème forestier. Et celui protégé par le Parc est unique, comme le prouve notre balade dans la forêt d'Auberive, 13 000 hectares sur les 200 000 du PN de forêts, déployé entre Haute-Marne et Côte d'Or. « C'est un ensemble de grosses forêts domaniales plutôt anciennes, de 200 à 300 ans minimum. Son trait dominant est la grande variété d'espèces, jusqu' à quinze par parcelle. Son sous-étage, avec de nombreux arbustes, garantit la présence de beaucoup d'insectes.
Chercher mammifères, oiseaux et insectes
L'autre signe distinctif est l'existence de marais tufeux. Il s'agit de marnes qui arrêtent l'eau infiltrée et favorisent la croissance de plantes rares », explique Jean-Yves Goustiaux. Diversité d'espèces (hêtres, tilleuls, aliziers, charmes, érables, chênes, merisiers…), zones humides, hivers très rigoureux… tout concourt sur le papier à favoriser une saine résistance. « Cette forêt a supporté la tempête de 1999. Des espèces comme le tilleul sont très adaptées aux conditions de vie difficiles. Les vieux taillis sous futaie, eux, favorisent la croissance des champignons et des asperges sauvages. Et il y a même des arbres dits “ bio”. Ce sont ceux qui possèdent des trous de pics, des galeries d' insectes, des cavités racinaires… » Conséquence : la faune se régale. Chevreuils, renards, sangliers, martres, putois, chouettes hulottes… sont ici chez eux. Et le chat sauvage, adepte des clairières avec abris-sous-roche. Ou les rapaces, comme l'autour des palombes, appréciant les forêts âgées dans lesquelles il revient chaque année, utilisant le même nid. Ou, enfin, la rare cigogne noire. « C'est une espèce parapluie. Sa présence signifie que tout est en place en dessous, que le milieu est redevenu plus naturel et sauvage. Sur les 60 nids recensés en France, six sont dans le territoire du Parc national », dit le directeur.
S'inquiéter des dérèglements climatiques
Il y a pourtant des menaces. Jean-Yves Goustiaux nous les montre du doigt. Avec ses branches cassées au sol, une clairière témoigne que les hêtres au-dessus ont pris un coup de chaud. « Ils ont subi en une dizaine d'années autant de sécheresse que depuis leur naissance, il y a 100 à 120 ans. » Les frênes sont malades. S'il reste confiant dans la capacité de la forêt à se maintenir, grâce aux « forestiers qui font le pari que plus on continuera à favoriser la biodiversité, plus on encouragera sa résilience », il s'inquiète pour l'économie forestière locale, bûcherons, scieries, parqueteries… « Le marché va changer puisque certains métiers comme la tonnellerie viennent chercher ici des chênes et des hêtres de qualité, dont le nombre risque de se réduire. » Il est bon d'avoir ces éléments en tête lorsqu'on décide d'aller s'aérer dans les magnifiques forêts protégées de Haute-Marne.
Infos pratiques
Parc national de forêts. 20, rue Anatole-Gabeur, 52210 Arc-en-Barrois. Tél. : 03 25 31 62 35. forets-parcnational.fr
Centre d'Initiation à la nature d'Auberive Maison forestière de Charbonnières. 9, chemin du Val-Clavin, 52160 Auberive. Tél. : 06 98 91 71 86. chemindetraverse52.org
Le site propose un gîte d'étape, des roulottes en bois, des tentes nomades et des cabanes nature. Il assure quantité d'animations qui vont de la découverte nature dans le Parc national à des week-ends thématiques et des séjours d'itinérance douce, en passant par des chantiers participatifs et des randonnées avec ânes. Très bonne approche de l'éducation forestière.
Que faire à Auberive en dehors de la forêt ?

Depuis le XIIe siècle (rebâtie au XVIIIe siècle), elle fut couvent cistercien, filature de coton, prison centrale pour femmes (Louise Michel y resta 20 mois), colonie agricole pour garçons, communauté bénédictine et centre de vacances. Un destin hors du commun auquel s’est ajoutée une brique en 2004 avec sa transformation en centre d’art contemporain. À sa tête, Alexia Volot, issue d’une famille d’industriels originaires de Haute-Marne. Elle gère le fonds de 2 500 pièces constitué par ses parents, « de l’expressionnisme figuratif contemporain », dit cette dynamique directrice, issue de l’École du Louvre. Le résultat est inédit. De juin à fin septembre, le visiteur accède en effet à des expositions spécialisées de haute tenue mais découvre en prime un monument historique religieux (réfectoire des moines…), un verger-conservatoire et surtout l’étonnant étage des cellules d’isolement des femmes.
Infos pratiques
Centre d'art contemporain de l'abbaye d'Auberive. 52160 Auberive. Tél. : 03 25 84 20 20. abbaye-auberive.com
Découverte du monument historique et des expositions, proposées de juin à fin septembre.
Vos questions les plus fréquentes
Où manger et dormir à Langres et ses environs ?
Logis Hôtel du Cheval Blanc. 4, rue de l'Estres, 52200 Langres. Tél. : 03 25 87 07 00. hotel-langres.com
En cœur de ville, dans une ancienne abbaye transformée en auberge en 1793, l'hôtel 3* propose 23 chambres de différentes catégories, à partir de 80 €.
Menu à partir de 38 €.
Où manger et dormir dans les environs de Langres ?
Domaine du Moulin de Trimeule. 10, CD619, 52800 Marnay-sur-Marne. Tél. : 07 67 51 47 11 / 06 10 50 87 78. moulindetrimeule.com
Sept hébergements atypiques en forêt, façon écogites-écolodges. Ouvert depuis mai 2021, le site plaira aux amateurs de nuits insolites et de qualité, dans les bois de part et d'autre d'un ruisseau. Trois formules de repas sont proposées, livrés en chambre par les gérants du lieu. Ouvert toute l'année.
De 99 à 249 € la nuit selon taille et confort.