Le château de Bonaguil, la fin d'un monde
Entre Quercy et Périgord, le château de Bonaguil a été bâti à la fin du XVe siècle par un seigneur mégalomane qui refusait le monde nouveau et la paix. Pour tout amateur du monde secret des châteaux forts, il est de loin le plus abouti.
En lieu et place de cette forteresse orangée qu’est Bonaguil, se dressait à l’origine un simple rocher abritant une caverne (devenue tunnel). Un premier château y a été posé au XIIIe siècle, qu’une riche famille du Midi a métamorphosé.
L'histoire du château fort
Nous sommes en 1907 et Thomas Edward Lawrence, futur Lawrence d’Arabie, fait le tour des châteaux forts de France à bicyclette. Comme lui, on ne peut que tomber sous le charme de ces tours blondes et élancées qui grimpent à l’assaut du ciel et d’un invisible ennemi. Car l’histoire de Bonaguil est singulière.
Elle est si parfaite qu’il est presque ridicule d’appeler cela une ruine.
Bonaguil, « Bona accus », « bonne aiguille », est à l’origine un rocher percé d’une grotte. Situé entre deux vallons escarpés, il s’habille d’un premier château au XIIIe siècle. Mais il faut attendre les Roquefeuil, une puissante famille du Midi, et surtout l’un de ses représentants, Bérenger.
L’homme se prend de passion pour le lieu et va engloutir sa fortune afin de le transformer en une forteresse imprenable. Seul hic : nous sommes en 1483, la guerre de Cent Ans est terminée depuis trente ans et une mode venue d’Italie transforme les châteaux forts en palais de la Renaissance. Mais Bérenger refuse ce monde nouveau et décide de bâtir un château à la gloire de la chevalerie.
L'architecture de Bonaguil
Juché sur son éperon rocheux, le château de Bonaguil domine le village et l'ensemble de la vallée. Il forme un ensemble, unique en Europe, aux proportions gigantesques et dans un état de conservation remarquable. Deux enceintes, sept ponts-levis, treize tours : il faudra quarante ans pour bâtir Bonaguil.
De robustes remparts
En franchissant la barbacane et la première enceinte, on s’imagine dans la peau d’un assaillant : attention, il faut survivre au tir rasant des canonnières ! Car si le château est anachronique, Bérenger l’a fait équiper des dernières innovations en matière de défense : les murailles comptent une centaine de meurtrières et d’archères qui éliminent tous les angles morts !
Viennent ensuite la seconde enceinte et ses cinq tours, dont la Tour grosse : les étages supérieurs servaient d’habitation, mais la partie inférieure est équipée de mousquets, d’arquebuses et de couleuvrines. Entre l’actuelle esplanade et la Tour rouge, voici une chicane, un terrible piège pour l’attaquant qui pénètre dans un étroit couloir et se trouve pris sous le feu d’une canonnière.
L'orgeuil du château : son donjon
En forme de proue de navire pour dévier les boulets, il est surmonté d’une tourelle de guet qui ne laisse aucune chance à l’ennemi. Grimpez sur sa terrasse : de là-haut, on a une vue très parlante sur l’ensemble de l’édifice. C’est aussi un endroit idéal pour méditer sur la vanité des hommes. Car Bonaguil, chef-d’oeuvre de l’architecture militaire, ne fut jamais attaqué (seule la Révolution mit à mal les bâtiments). Un peu comme un désert des Tartares au-dessus de la vallée du Lot.
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