Entre Blois et Amboise, la Loire se prête bien à la pratique du canoë. « L’horizon est vaste, le regard vagabonde librement, et il y a parfois le spectacle d’un chaland ou d’une toue cabanée (ne parlez pas de gabarres, celles-ci sont sur la Dordogne, ndlr) », explique Jean-François Souchard pendant le briefing technique. Ce guide nautique, qui est aussi photographe, organise des promenades sur la Loire avec bivouac sur une île... Mais c’est sur le Cher, à hauteur de Chenonceau, qu’on le retrouve. Changement d’atmosphère. Entre Tours et Saint-Aignan, l’affluent de la Loire est canalisé et parfaitement navigable grâce aux plans d’eaux (les biefs) créés par les barrages à aiguilles, construits voilà plus d’un siècle et demi. « Autrefois, les bateaux passaient par ici pour éviter la portion de Loire difficilement navigable en amont de Tours. Le Cher donnait accès au canal de Berry, d’où on rejoignait le canal latéral à la Loire, le canal du Centre. C’était beaucoup plus confortable, même s’il fallait passer 16 écluses sur 80 kilomètres... »
En canoë canadien à Chenonceau

Là, pas de courant pour contrarier la navigation. Le canoë canadien glisse sur l’eau à la seule force de nos coups de pagaie. Au petit matin, des écharpes de brume s’attardent sur l’eau. La féerie commence. Venant de l’amont, le château apparaît presque d’un coup, après un virage. Tel un pont habité de conte de fées, le château de Chenonceau s’étire au-dessus de l’eau avec grâce. Ses arches lui donnent des airs de duchesse relevant ses jupons pour ne pas se mouiller. L’absence de courant rend l’eau aussi lisse qu’un miroir. Éblouis, nous nous sommes arrêtés de pagayer pour mieux admirer les arches se dédoublant dans l’eau. Jean-François ne se lasse jamais de photographier ce spectacle. « Quand on regarde la photo, on ne sait plus distinguer le château de son reflet ! » Le temps semble alors se figer, tandis que l’on passe doucement sous l’une des arches de pierre.
Les couleurs uniques du Val de Loire

À cet endroit, les bateaux du XIXe siècle baissaient leurs mâts pour pouvoir traverser. Évidemment, on ne se prive pas de passer et repasser sous les jupons du château de Diane de Poitiers et de Catherine de Médicis. Arrivés à Civray, la messe est dite. Mais il existe une option : redécouvrir le château de Chenonceau dans l’autre sens, en partant de Civray et en remontant vers l’amont. « C’est aussi très beau car on distingue le château d’assez loin, il grossit progressivement. Tôt le matin, on peut voir le soleil levant pointer entre les arches, traverser les vitres du château... » Et au coucher du soleil, les rayons viennent caresser la façade ouest. « C’est la lumière de Touraine, chaude, enveloppante... C’est très joli à partir de mai, mais je préfère venir ici en septembre et début octobre. Les fins de journée sont plus longues et la lumière, magique. »