Saint-Emilion, un patrimoine grand cru
Pampres, vrilles et raisins lui tressent une ceinture dorée qui font d’elle une « capitale » capiteuse du vin et l'un des plus beaux villages d'Aquitaine. Balade dans Saint-Émilion, bourg médiéval du Libournais juché sur les coteaux entre la Dordogne et l'Isle.
Une trésor d'Aquitaine
Si vous aimez vous approprier les lieux, laissez la cohue touristique passer et attendez la tranquillité vespérale revenue pour vous mettre en chemin. Le soleil déclinant pare les pierres de Gironde de teintes ocre, les tuiles canal virent au rosé, offrant un surcroît de sensualité aux « tertres » (le nom local des ruelles pavées pentues) et aux placettes qui, sous l’ombre des arbres, retrouvent la fraîcheur.
Bâti au XIIe siècle, le village se fortifie rapidement d’une ligne de remparts, percée de six portes d’entrée, dont il ne subsiste réellement que la porte Brunet, à l’est.
Jean sans Terre instaura la jurade
Ce cœur médiéval se ressent au gré des tertres, ruelles, venelles aux degrés pierreux qui « escaladent » le relief escarpé. La place du Marché rappelle qu’au XIIe siècle, Jean sans Terre, roi d’Angleterre, par la Charte de Falaise, confirma les privilèges accordés par Richard Cœur de Lion à la cité et instaura la jurade, délégation des pouvoirs politiques, économiques et judicaires à une assemblée de notables Saint-Émilionnais (54 jurats) en échange de la pleine jouissance du « privilège des vins de Saint-Émilion ».
La jurade avait l’obligation d’apposer le sceau du vinetier (label qualité) sur toutes les barriques à destination de l’Angleterre. Une organisation qui prévalut jusqu’à la Révolution et qui renaîtra en 1948. Aujourd’hui, cette confrérie, ambassadrice des vins de Saint-Émilion, se réunit en grande tenue d’apparat pour le Jugement du vin nouveau, en juin, et le Ban des vendanges, en septembre.
Une église créusée dans le calcaire
Moment attendu du parcours découverte, l’église monolithe. Unique en Europe, elle a été creusée et modelée entre les XIe et XIIIe siècles dans le calcaire par des moines, autour de l’ermitage du moine breton Émilian, saint fondateur de la cité au VIIIe siècle. Le portail, qui a succédé à une entrée très étroite, est orné d’un tympan figurant le Jugement dernier qui ne laisse pas deviner les dimensions intérieures du sanctuaire : 38 mètres de long sur 20 mètres de large et autant pour sa partie la plus haute.
Mais l’une des surprises du patrimoine troglodytique de Saint-Émilion se trouve sous vos pieds. Des kilomètres de galeries excavés dans le calcaire abritent des catacombes avec des enfeus creusés dans les parois de l’époque romane, une grotte où vécut saint Émilian et des chais à barriques souterrains.
Offrez-vous une vue panoramique
Des entrailles de la terre, montez au ciel en grimpant au sommet de l’église, une ascension de 54 mètres qui vous offrira une vue à 360° sur le village. De l’autre côté de la place des Créneaux se dresse l’église collégiale (XIIe-XIVe siècles), où sont conservées les reliques de saint Émilian.
Au registre du patrimoine architectural religieux, voyez également la chapelle de la Trinité, érigée au-dessus de l’Ermitage (où coule une source miraculeuse) ; le couvent des Jacobins ; le couvent des Cordeliers (chapelle du XVe siècle et cloître).
À deux pas des couvents, la rue Guadet abrite, aux côtés de demeures médiévales plus modestes, une belle maison gothique du XIVe siècle, improprement appelée maison des Templiers. Dans la partie sud du bourg médiéval se trouve le château du Roy, dont subsiste un massif donjon-citadelle roman quadrangulaire haut de 32 mètres.
En quittant Saint-Émilion pour quelques incursions bachiques dans le triangle d’or des Saint-Émilion-grands-crus – château-cheval- blanc, château-ausone, château-pavie... – pensez à cette phrase de l’écrivain et amoureux des bordeaux Pierre-Jean Remy, elle semble avoir été écrite pour ce village : « Les bordeaux de toujours ont gardé leur même place : la première. Comme un poème de Baudelaire, une mélodie de Duparc ou de Fauré, le soulier rouge de la duchesse de Guermantes, l’odeur de Venise pour Aschenbach agonisant ou le masque de l’inconnue de la Seine : la première place, toujours. »
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