Normandie : un immense tableau de maître
Immédiatement, les images défilent : bocage, pommiers, chaumières, prairies. Bref, un rêve de nature, une terre de culture, dans tous les sens du terme. L’eau fait aussi partie du tableau. Et pour donner du relief aux paysages, le ciel comme paradigme normand. Fugace, fugueux, il fut le désespoir et l’exutoire des impressionnistes. La vallée de la Seine résume ce monde entre terre et eau : des méandres cachant abbayes et villages, des fonds de vallées où se sont ancrées de dynamiques villes- ports, un estuaire resplendissant de lumière.
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Entre Yport (au sud) et Fécamp (au nord), la Côte d’Albâtre vous amène au vallon de Grainval, que Monet peignit après sa rencontre avec Maupassant à Étretat. Le vallon offre une rampe d’accès au platier. Au-dessus de vous, les falaises à 82 mètres de hauteur, millefeuille de craie et de silex. Au premier plan (en haut et à droite) et à l’extrême gauche, deux beaux exemples de valleuses. Le ruissellement des eaux pluviales du plateau cauchois, en pente vers la mer, crée parfois de véritables sources qui, à l’instar de cette Roche qui pleure, jaillissent des parois.
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Les quais des brumes à Rouen. Sur notre photo, point de couple mythique du cinéma français s’embrassant dans la cabane Panama au Havre, sur fond de réplique d’anthologie : « T’as d’beaux yeux, tu sais ! » Mais une troublante même atmosphère empreinte de réalisme poétique. Du quai Jean-de-Béthencourt, à Rouen, on découvre les « grues Picasso ». Ces engins de levage titanesques – des grues Caillard – datent des années 1960. Elles furent surnommées ainsi par les dockers car leurs couleurs éclatantes (jaune, bleu vif, rouge, vert) tranchaient radicalement avec le gris des grues de l’époque.
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La Seine modèle à Muids. Le fleuve comme un spectacle perpétuel, jamais le même, toujours en mouvement. Un fleuve comme un personnage, avec ses valeurs, ses fulgurances, sa force, sa faim d’aventure, ses traîtrises. Ici, aux rives de Muids, en aval des Andelys (Eure), où est né Nicolas Poussin et où Turner réalisa pour partie ses Flâneries au bord de la Seine, on comprend mieux pourquoi, à partir des années 1870, Monet, Pissarro, Gauguin, Lebourg ou Sisley y amarrèrent leurs chevalets de campagne. Dans les vibrations de la lumière, tout un monde de sensations, d’impressions, provoque le génie créatif...