Villa Ephrussi de Rothschild, un joyau de la riviera
Entre 1905 et 1912, Béatrice Ephrussi de Rothschild se fit construire l’une des plus extraordinaires villas de la Côte d’Azur, digne des plus beaux palais vénitiens.
Aujourd’hui propriété de l’Institut de France, cette folie Belle Époque digne des plus beaux palais vénitiens présente l’incroyable collection d’objets d’art de la baronne.
Un rêve de milliardaire
Un caprice de diva. En 1905, après avoir découvert la Riviera française, l’excentrique baronne Béatrice Ephrussi de Rothschild, fille du baron Alphonse de Rothschild et ex-épouse du banquier Maurice Ephrussi, décide de se faire construire, sur la partie la plus étroite de la presqu’île de Saint-Jean-de-Cap-Ferrat, un palais marqué par la Renaissance italienne. À partir de 1907, une dizaine d’architectes se succèdent, en cinq ans de chantier, pour répondre à ses exigences !
« C’était elle, la vraie architecte… Avec son caractère bien trempé, elle savait exactement ce qu’elle voulait, elle a même commandé une maquette grandeur nature, avant la construction. La baronne y réside quelques hivers, mais cesse d’y habiter en 1916, raconte Pacôme de Galliffet, le directeur de la Villa. À la mort de la baronne, sans descendance, e n 1934, le palazzino est légué à l’Académie des beaux-arts de l’Institut de France. »
"Un moment inoubliable"
Découvrir la villa Ephrussi, juchée sur un promontoire entouré de neuf jardins, est un moment inoubliable. L’isthme offre en effet ici des points de vue magiques sur la Grande Bleue : d’un côté, à l’ouest, on domine la rade de Villefranche, de l’autre, la baie de Beaulieu. Ce palais à la façade aujourd’hui rose et sertie de marbre fut appelé Villa Île-de-France, ce domaine lui rappelait le luxueux paquebot du même nom.
« La propriété est construite un peu comme le pont d’un bateau, la cabine figurant la maison, et les jardins à la française, la proue. Ici, on a l’impression d’avancer dans l’eau… D’ailleurs, la trentaine de jardiniers au service de la baronne se devaient d’être habillés en matelot, avec béret et pompon rouge ! »
À l’intérieur de la villa, le décor est digne des plus beaux palais vénitiens. Voyez le patio, lieu des grandes réceptions, qui en met plein la vue avec ses arches portées par des colonnes en marbre rose de Vérone. Il ouvre sur le grand salon, remarquable avec ses boiseries peintes provenant de l’hôtel de Crillon, son plafond orné d’une toile du peintre vénitien Giandomenico Tiepolo ou encore ce tapis de la chapelle royale de Versailles… Quelque 7 000 objets d’art collectés par la famille sur plusieurs générations sont présentés dans la villa.
« Ici sont regroupées les collections qu’elle détenait dans au moins cinq de ses demeures. Béatrice de Rothschild était une grande collectionneuse : elle faisait venir des oeuvres par train à Beaulieu, qu’elle sélectionnait ensuite sur le quai de la gare !, sourit le directeur. Elle était capable d’acheter une chapelle uniquement pour avoir un retable, une statuaire ou une fresque. » Partout, transparaît la passion de la baronne pour le xviiie siècle. « Béatrice de Rothschild collectionnait d'ailleurs des robes Marie-Antoinette, une reine qui l’a marquée par sa beauté, son excentricité… », précise le directeur.
Les neuf merveilles

Autour, on y effectue un vrai voyage au gré des jardins de Sèvres, espagnol, florentin, japonais, provençal et exotique, et une roseraie (plus de cent variétés). Mais notre préférence va au ravissant jardin lapidaire. Au pied d’un camphrier et d’un laurier de Californie sont dispersés tous les éléments architecturaux trop monumentaux pour être à l’intérieur : ici, dans un désordre très calculé, des gargouilles médiévales, là, des bas-reliefs d’édifices Renaissance, gnomes provençaux, arceaux…
Dans la villa Ephrussi, on peut admirer une incroyable collection de porcelaines de cette époque, avec des pièces de Saxe, de Sèvres, ainsi que des tapisseries de la Manufacture royale des gobelins, des tableaux de Fragonard… L’étonnant salon chinois renferme deux panneaux de laque à la feuille or du XVIIIe siècle provenant du palais d’été de Pékin. Il faut voir aussi l’insolite salon des singes. La baronne possédait deux primates. « Ils ont la faveur d’être promenés par un majordome choisi parmi les anciens généraux de la garde du tsar », s’étonnait l’un des architectes de la villa.
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