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La Routo (GR 69), la montagne par ses drailles

Par Vincent Noyoux

Plus besoin d’être berger pour découvrir la beauté âpre des pâturages des Alpes-de-Haute-Provence. Le sentier de grande randonnée, la Routo ou GR 69, nous emmène sur les anciennes drailles empruntées par les bergers provençaux. À partir du col de Bernardez, une boucle à la journée nous fait découvrir leur territoire.

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Col de Bernardez
Les chemins de transhumance entre Arles et Borgo San Dalmazzo, en Italie, jouent à saute-frontière. Le col de Bernardez sépare les vallées de la Blanche et du Laverq.

A l'origine du GR 69

Du milieu du XVe siècle jusqu’aux années 1950, la grande transhumance estivale pédestre menait les ovins des plaines de basse Provence jusqu’à la vallée de la Stura, en Italie. On dit qu’ils « faisaient la route ». C’est pour offrir aux randonneurs d’aujourd’hui la beauté des plaines rocailleuses et des paysages alpins que le futur GR69, baptisé « la Routo », a été tracé. Ce sentier suit l’une des quatre principales voies de transhumance, entre Arles et Borgo San Dalmazzo. Il passe notamment par le col de Bernardez, un des points culminants du parcours (2 304 mètres).

Au-dessus de Seyne-Les-Alpes

C’est justement vers ce col que nous grimpons au départ de la maison forestière de Bellevue, dans les hauteurs de Seyne-les-Alpes. La forêt domaniale de la Blanche nous offre l’ombre de ses mélèzes, mais dès la source de la Chandelette, le paysage se dénude. La draille, ou carraire (sentier de transhumance), pierreuse à souhait, devient étroite et pentue. « Il faut imaginer des milliers de moutons montant au col en file indienne », explique Patrick Fabre, directeur de la Maison de la transhumance, à l’origine de la Routo. Afin de repérer l’essentiel de l’itinéraire, connu à l’époque sous le nom de « carraire d’Arles », il a procédé à un examen approfondi du cadastre napoléonien des communes traversées. « Dix ans de travail ! », sourit l’intéressé.

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Des randonneurs sur le GR69
Au sommet du pic de Bernardez (2 430 m), la vue porte sur les Écrins et le Dévoluy au nord, la chaîne de la Blanche et l'Estrop au sud, le Laverq et l'Ubaye à l'est. La vallée de la Blanche est à l'ouest. Si c'est une grande joie d'accéder au sommet, l'exigence des sentiers y est pour beaucoup.

Un vautour fauve plane au-dessus de nous tandis que nous atteignons le col, qui surplombe un paysage minéral, à peine adouci par quelques pelouses d’altitude. Notre boucle nous fait bifurquer vers le pic de Bernardez, à 2 430 mètres d’altitude. Nous suons à grosses gouttes le long de l’échine rocheuse qui domine la vallée de la Blanche d’un côté, et la vallée de l’Ubaye de l’autre. Le pic est là, enfin ! « L’âme de la Haute-Provence », que Jean Giono situait sur le plateau d’Albion, flotte peut-être sur ces hauteurs pelées. La vue à 360° vaut tous les efforts : les vallées en contrebas, la crête des Grisonniers, le massif des Monges, les cimes du Queyras et, en second rideau, celles des Écrins enneigés.

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Fôret domaniale de la Blanche
Un peu de fraîcheur entre les mélèzes de la fôret domaniale de la Blanche.

La vallée de l'Ambouin et sa forêt de Mélèzes

Le sentier descend, assez raide, vers le col Bas. Il longe une ligne de crête de toute beauté, qui enserre l’aride vallon de l’Ambouin. Un raidillon à découvert, une forêt de mélèzes aux troncs courbés à force de ployer sous la neige, et nous arrivons au col Bas (2 100 m) au son des sonnailles. Mille deux cents moutons s’égaient dans les alpages, sous l’oeil d’Arnau, un berger catalan-andorran.

« Ils se connaissent depuis longtemps, ils montent en estive ensemble chaque année, de fin juin à mi-octobre ! Je me lève avec eux vers 7 heures, ils broutent, puis ils chaument vers 11 heures, c’est-à-dire qu’ils restent à ruminer en groupe. À 17 heures, c’est le pacage en ordre dispersé jusqu’au soir », explique calmement ce trentenaire, dont les dreadlocks descendent jusqu’aux fesses.

Le troupeau dégringole la pente dans un nuage de poussière que les rayons du soleil saupoudrent d’or comme une enluminure. Les brebis viennent s’abreuver au lac Noir, tout bordé de joncs. Juste en face, une montagne au profil de roi Bourbon s’appelle justement la « tête de Louis XVI ».

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La Routo ou GR69
Tout au long des 480 kilomètres de sentiers, un balisage précieux pour les néophytes de la transhumance.

Des milliers de moutons dans la vallée de la Blanche

Marc Savornin, l’un des cinq éleveurs dont les brebis composent le troupeau d’Arnau, nous a rejoints. Il n’est pas tendre avec le loup, qui fait des siennes depuis environ huit ans. « L’été dernier, un adolescent s’est retrouvé face à une meute à Seyne-les-Alpes, juste à côté ! Le loup a tué plus de 30 brebis sur cet alpage en 2013. Et j’ai déjà perdu 170 agneaux, mort-nés ou d’un arrêt cardiaque à cause du stress généré par les attaques de loups. »

Autrefois, la vallée de la Blanche voyait défiler plusieurs dizaines de milliers de brebis, venues de la plaine de la Crau pour rejoindre la haute Ubaye et les vallées alpines du Piémont italien. Leur nombre a diminué bien sûr, mais en période d’estive, ce serait bien le diable si vous ne croisiez pas un troupeau en train de paître paisiblement sur cette portion de la Routo. Nous rejoignons la maison forestière par la forêt de la Blanche, fin de la balade. En attendant, peut-être, une randonnée au long cours : la Routo offre 480 kilomètres de sentiers, 400 côté français.

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Troupeau de moutons sur les drailles
Le troupeau mené par Arnau suit les drailles empruntées par les bergers piémontais depuis des siècles. La Routo permet aux simples marcheurs de découvrir ces paysages.