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Débarquement : 3 lieux qu'il faut avoir vu dans sa vie

Le musée du Débarquement d’Utah Beach met en scène les sites et équipements clés du D-Day. Il y a, par exemple, une barge de débarquement sur la plage. © Jérôme Houyvet / Détours en France

Publié le par Stéphanie Grésille et Dominique Roger

Replongez dans cette page décisive de la seconde guerre mondiale en visitant les sites qui ont fait du 6 juin 1944 une date clé de notre histoire. 

De manière incontestable, l’histoire du Débarquement en Normandie se vit et se ressent sur place, mieux et plus intensément que nulle part ailleurs dans le monde, sur les traces des soldats dont bon nombre d’entre eux ont péri sous les feux et les répliques intensives de l’armée allemande. C’est pour cette raison que de la plage d’Utah Beach à Cherbourg, en passant par Carentan, Saint-Lô, Coutances, Avranches... sur l’ensemble du Cotentin, du littoral jusque sur les chemins les plus isolées, la voie de la Liberté est jalonnée de sites  commémoratifs dont l’enjeu est de ne jamais faire tomber dans l’oubli les souffrances, l’exode et la longue reconstruction d’après-guerre. Car si la liberté n’a pas de prix, les habitants, les villes, les monuments, les bâtiments ont payé un lourd tribut pour faire triompher l’offensive des Alliés.

Le marais de Carentan, l’assaut des parachutistes

Chaque année, à Carentan, les vétérans (ici, Raymond R. Wallace) assistent à la parade militaire, en souvenir de leurs camarades tombés au front.
Chaque année, à Carentan, les vétérans assistent à la parade militaire, en souvenir de leurs camarades tombés au front. © Jérôme Houyvet / Détours en France

Pour se faire une juste vision du théâtre de la bataille dans le marais de Carentan, il faut venir ici en hiver, lorsque le marais est dit « blanc ». En effet, le marais est formé par la réunion de plusieurs fleuves côtiers qui se retrouvent dans la baie du Grand Vey, plaine très peu élevée au-dessus du niveau de la mer. Depuis le xvie siècle, des digues et des écluses ont été aménagées pour empêcher la marée d’envahir toute la plaine.

Avec les fortes pluies hivernales, ce polder ne parvient pas à se vider et se trouve inondé. Le meilleur point de vue est peut-être le village de Graignes (6 km au sud-est de Carentan), et plus précisément le site du Mémorial qui rappelle les atrocités commises envers la population et les prisonniers de guerre américains par les SS. En juin, le marais est généralement en partie asséché. Mais le maréchal Rommel, découvrant lui aussi les lieux en hiver, avait compris que le marais blanc formait un lac qui coupait la base du Cotentin depuis Carentan jusqu’aux abords de Port-Bail, sur la côte ouest de la péninsule. C’était là le meilleur des barrages antichars pour protéger Cherbourg qu’il savait faire la convoitise des Alliés.

Une simple intervention sur les écluses lui permit de noyer le marais. Sans doute l’état-major allié n’avait-il pas mesuré ce qu’en signifiait l’immersion, sans quoi les parachutistes américains auraient été dotés de canots pneumatiques... Des dizaines et des dizaines d’entre eux, incapables de se dépêtrer de leur parachute et de leurs 40 kilos d’équipement, se noyèrent. Ajoutons à cela le fait que le vent, très fort dans la nuit du 5 au 6 juin, dispersa les troupes, qui se trouvèrent incapables de s’orienter et de se regrouper dans ce labyrinthe d’eau. La Libération commençait sous de très mauvais auspices.

Ci-contre, le vétéran Raymond R. Wallace à la parade militaire à Carentan.
Ci-contre, le vétéran Raymond R. Wallace qui assiste à la parade militaire (Carentan). © Jérôme Houyvet / Détours en France

Sainte-Mère-Église, une bataille et un symbole

Pour célébrer le D-Day, Sainte-Mère-Église se met à l’heure américaine. Marche pour la paix, défilés, cérémonies de recueillement devant la borne zéro ou le monument Signal, bal, concerts... la fête dure plusieurs jours.
Pour célébrer le D-Day, Sainte-Mère-Église se met à l’heure américaine. Marche pour la paix, défilés, cérémonies de recueillement devant la borne zéro ou le monument Signal, bal, concerts... la fête dure plusieurs jours. © Jérôme Houyvet / Détours en France

En tenant ce paisible bourg agricole, les parachutistes américains devaient fournir une porte sur le Cotentin aux troupes débarquées à Utah Beach. Ils menèrent à bien leur mission au prix de combats sanglants. Sainte-Mère fut la première commune libérée par l’opération Overlord ; c’est pourquoi, devant l’hôtel de ville, se dresse la borne zéro de la voie de la Liberté. Ce balisage symbolique, établi après la Libération, signalait les routes suivies par l’armée américaine, mais il n’est désormais visible qu’en Normandie et dans le nord-est de la Bretagne. C’est en y arrivant depuis le marais de Carentan qu’on comprend l’intérêt stratégique que présentait en 1944 cette bourgade. D’abord, elle se trouve sur la rive nord du marais, sans obstacle naturel jusqu’à Cherbourg, situé à 30 kilomètres. C’est aussi ici que convergent les petites routes des villages situés entre Ravenoville et Sainte-Marie-du-Mont, dont les plages formaient le site de débarquement d’Utah Beach.

la reconstitution du camp Geronimo à Sainte-Mère-Église est une réussite. Ici, le « post exchange », petit magasin de fournitures pour GI.
La reconstitution du camp Geronimo à Sainte-Mère-Église est une réussite. Ici, le « post exchange », petit magasin de fournitures pour GI. © Jérôme Houyvet / Détours en France

Les circonstances de la prise de Sainte-Mère-Église sont dignes d’un film à grand spectacle. Dans la nuit du 5 au 6 juin, une maison avait pris feu sur la place de l’église ; le tocsin sonna pour appeler les pompiers. Une foule de gens était dehors, lorsqu’on entendit le vacarme des avions. Bientôt apparurent les corolles des parachutes, et une bataille s’engagea. Aujourd’hui, un mannequin accroché au clocher sert de monument commémoratif. Il est bon de savoir que l’histoire du soldat John M. Steele, révélée par le film Le Jour le plus long, ne fait pas l’unanimité chez les historiens. Dans l’église, on peut cependant admirer le curieux vitrail réalisé en 1947 pour immortaliser l’événement.

Dans la nuit du 6 juin 1944, le parachutiste John M. Steele resta accroché au clocher de l’église à 10 m du sol avant d’être fait prisonnier par les Allemands. Aujourd’hui, posé sur le toit, un mannequin à son effigie rappelle sa mésaventure.
Dans la nuit du 6 juin 1944, le parachutiste John M. Steele resta accroché au clocher de l’église à 10 m du sol avant d’être fait prisonnier par les Allemands. Aujourd’hui, posé sur le toit, un mannequin à son effigie rappelle sa mésaventure. © Jérôme Houyvet / Détours en France

John M. Steele, héros de Sainte-Mère

Il ne peut rien arriver de pire à un parachutiste que d’atterriren pleine ville. Surtout s’il est accueilli par le feu nourri de l’ennemi. John Steele, Américain lancé au-dessus de Sainte-Mère-Église dans la nuit du 5 au 6 juin, cumula les malchances puisque, atteint par une balle, il perdit le contrôle de son parachute, qui vint s’accrocher au clocher de l’église où sonnait le tocsin. Faire le mort lui sauva la vie, et c’est un soldat allemand qui, l’ayant décroché, le fit prisonnier. Mais le jeune homme parvint à s’évader et, après une hospitalisation, il repartit au combat où il s’illustra aux Pays-Bas et en Allemagne.

Patrick Tissot, passeur de mémoire

Professeur d’histoire-géographie, Patrick Fissot collectionne objets et témoignages de la Seconde Guerre mondiale depuis ses 10 ans. Son grand-père, fait prisonnier le 18 juin 1940, ne reviendra d’Allemagne qu’en avril 1945. Durant ses loisirs, le jeune Patrick collectait la parole de ceux qui avaient vécu l’Occupation, le Débarquement, la Libération. Certains lui donnaient un casque, une veste, un écussonen guise de souvenir... La passion était née. Rien de plus naturel donc que d’ouvrir un lieu consacré à cette grande page de l’Histoire avec Nicolas Bellée et Christophe Beaussire, deux autres passionnés. Avec ses 15 000 objets et autant dans les réserves, le Normandy Victory Museum voit le jour en 2017. Patrick Fissot incite également ses élèves à participer au Concours national de la Résistance et de la Déportation. Certaines années, les plus chanceux s’envolent pour les États-Unis sur le site de Fort Campbell, qui abrite la 101st Airborne Division et le 160th Special Operations Aviation Regiment.

Utah Beach, plage du débarquement aux portes de Cherbourg

Entre les dunes de Quinéville et la baie du Grand Vey, de part et d’autre des lieux-dits Varreville et La Madeleine, où se conce tra l’attaque, s’étendent sur une quinzaine de kilomètres les plages d’Utah Beach. Le 7e corps d’armée US, qui y débarqua, avait pour mission d’effectuer la liaison avec les parachutistes lancés dans la nuit vers Sainte-Mère-Église, pour isoler le nord du Cotentin puis s’emparer de Cherbourg. À marée basse en longeant la mer au ras de l’eau, on a sur la dune à peu près la même image que celle qui apparut aux GI lorsque le tablier avant de leurs péniches de débarquement s’abattit sur le sable. Solitaires au large pointent les deux îles Saint-Marcouf. Et au niveau des dunes, sur la route qui longe la baie de Seine, le paysage n’a guère changé depuis juin 1944. On roule de hameau en hameau, quelques maisons à chaque fois, mais l’atmosphère reste sauvage, presque toujours calme, parce que cette partie de la côte est parfaitement abritée des vents d’ouest dominants et de la houle. De fait, le bocage du Cotentin, avec ses nombreux villages, ne commence qu’à trois kilomètres de la mer avec les premiers reliefs. Entre ces derniers et le cordon de dunes s’étend une vaste zone marécageuse, désertique. Les Allemands avaient estimé que celle-ci offrait une défense naturelle suffisante contre une attaque d’envergure et n’avaient donc pas fortement défendu ce tronçon du littoral. Cela n’échappa pas aux Alliés qui, de plus, voyaient un intérêt stratégique capital au site : se trouver à 30 kilomètres de Cherbourg sans obstacle naturel à franchir. Un bombardement aérien à basse altitude, effectué par des B-26 Marauder, anéantit une partie des batteries ; tandis que les troupes géorgiennes et russes se trouvant positionnées dans le secteur n’exercèrent qu’une résistance réduite à l’armée américaine qui, dans la jour- née, débarqua 23 000 hommes et 1 700 véhicules ! Ils vinrent donc tout de suite appuyer les parachutistes de Sainte-Mère-Église, mais il ne fut pas possible d’aller plus loin.

Il faudra trois semaines de combats pour prendre

Un second débarquement fameux eut lieu à Utah Beach, français celui-là, le 1er août 1944 : celui de la 2e division blindée du général Leclerc, la fameuse 2e DB. Sans doute ses 16 000 hommes (pour 5 000 véhicules) déploraient-ils de ne pas avoir été en première ligne dès le 6 juin, mais ils se rattrapèrent puisque dans les 24 jours qui suivirent, la 2e DB participa à la percée d’Avranches puis mena l’attaque par Le Mans, Alençon, Chartres, Rambouillet, avant de faire une entrée triomphale dans Paris en état d’insurrection. 

Quelle est la plage la plus meurtrière du débarquement en Normandie ?

La plage d'Omaha est celle où déroulèrent les combats les plus meurtriers du 6 juin 1944.

Quel musée choisir pour en savoir plus sur le débarquement?

Musée Airborne

À travers ses 4 bâtiments à la scénographie moderne, interactive et spectaculaire, le musée vous guide sur les pas des parachutistes américains du Jour-J.
À travers ses 4 bâtiments à la scénographie moderne, interactive et spectaculaire, le musée Airbrne vous guide sur les pas des parachutistes américains du Jour-J. © Jérôme Houyvet / Détours en France

Les différents pavillons du musée font entrer le visiteur dans le vif du sujet. Le premier abrite un planeur américain du type Waco. Remorqué par un C-47, cet engin transportait l’armement indispensable aux parachutistes pour résister aux contre-attaques allemandes. Dans le deuxième bâtiment, un authentique bimoteur Douglas C- 47 Skytrain est présenté avec des mannequins, pour reconstituer la scène de l’embarquement des parachutistes des 82e et 101e divisions américaines. L’effet est saisissant, mais ce n’est rien à côté des émotions que réserve la scénographie du troisième bâtiment, qui place le visiteur à bord du C-47 avant le saut, la nuit dans les marais et sur la place de Sainte-Mère-Église. Avant de sortir, on découvre un troisième vétéran du débarquement : un avion de reconnaissance Piper Cub. Depuis 2023, la visite des réserves du musée, animée par Éric Belloc, le conservateur de la collection, apporte une nouvelle approche intimiste.

Musée du débarquement d'Utah Beach

Le musée du Débarquement d’Utah Beach met en scène les sites et équipements clés du D-Day. Il y a, par exemple, une barge de débarquement sur la plage.
Le musée du Débarquement d’Utah Beach met en scène les sites et équipements clés du D-Day comme par exemple et ci-contre, une barge de débarquement sur la plage. © Jérôme Houyvet / Détours en France

Installé depuis 1962 dans les dunes, à l’endroit même où les soldats des troupes alliées foulèrentle sol normand, ce musée évoque l’occupation allemande, décrit les forces en présence à la veilledu Débarquement et met en relief l’intérêt stratégique du site pour les Alliés. Le clou du musée est le bombardier B-26 Marauder qui y est présenté (avec deux simulateurs de vol !) : ce type d’avion, spécialisé dans le bombardement à basse altitude, fut une des raisons pour lesquelles le débarquement sur Utah Beach fut relativement aisé. Sainte-Marie-du-Monta été l’une des premières communes libérées.

Sources

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