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Voici pourquoi Utah Beach reste l'un des lieux les plus marquants du Débarquement

Sur la plage de Saint-Laurent-sur-Mer, site d’Omaha Beach, une sculpture monumentale, Les Braves, d’Anilore Banon, rend hommage au courage des forces alliées durant l’été 1944. Réalisée en 2004, à l’occasion du 60e anniversaire du Débarquement, elle a désormais sa réplique au War Memorial du Michigan, aux États-Unis. Sur la plage de Saint-Laurent-sur-Mer, site d’Omaha Beach, une sculpture monumentale, Les Braves, d’Anilore Banon, rend hommage au courage des forces alliées durant l’été 1944. - © Francis Cormon / Détours en France

Publié le par Dominique Roger

Le mauvais temps qui oblige à reporter l’opération « Overlord » du 5 au 6 juin n’est que les prémices d’une bataille aux nombreux aléas. Le front s’étend sur toute la baie de Seine, entre le pied du Cotentin à l’ouest, et Cabourg à l’est, soit sur quatre-vingts kilomètres. Cet étalement sert à multiplier les chances de créer une tête de pont et à compliquer les ripostes allemandes. Mais il exige des Alliés une coordination sans faille, surtout lorsqu’il s’agira d’établir la liaison entre les fronts, qui ont pour noms de code : Utah, Omaha, Gold, Juno et Sword. S’y ajoute Port Winston, que les Anglais construiront de toutes pièces devant Arromanches.

Utah Beach

En bordure de la plage de la Madeleine, le musée du Débarquement d’Utah Beach comprend notamment plus de3000m2 de salles d’exposition dédiés aux succès et péripéties de l’opération Overlord.
En bordure de la plage de la Madeleine, le musée du Débarquement d’Utah Beach comprend notamment plus de3000m2 de salles d’exposition dédiés aux succès et péripéties de l’opération Overlord. © Jérôme Houyvet / Détours en France

À marée basse en longeant la mer au ras de l'eau, on a sur la dune à peu près la même image que celle qui apparaît aux GI lorsque le tablier avant de leurs péniches s'abattit sur le sable. Sur la route qui longe la baie de Seine, le paysage n'a guère changé non plus depuis juin 1944. On roule de hameau en hameau, mais l’atmosphère reste sauvage, presque toujours calme parce que cette partie de la côte est abritée des vents d’ouest ainsi que de la houle. De fait, le bocage du Cotentin, avec ses nombreux villages, ne commence qu’à trois kilomètres de la mer avec les premiers reliefs. Entre ces derniers et le cordon de dunes s'étend une vaste zone marécageuse. Les Allemands avaient estimé que celle-ci offrait une défense naturelle et n'avait donc pas à être fortement gardée. Cela n'échappa pas aux Alliés, qui voyaient en ce site un intérêt stratégique capital : se trouver à 30 kilomètres de Cherbourg et sans obstacle naturel à franchir. Un bombardement aérien à basse altitude anéantit une bonne part des batteries ; tandis que les troupes géorgiennes et russes positionnées dans le secteur n’exercèrent qu’une résistance réduite à l’armée américaine qui, dans la journée, débarqua 23 000 hommes et 1 700 véhicules ! Ils vinrent donc appuyer les parachutistes de Sainte-Mère-Église, mais il ne fut pas possible d'aller plus loin. Il faudra trois semaines de combats pour prendre Cherbourg. Un second pour débarquement eut lieu à Utah Beach, français celui-là, le 1er août 1944 : celui de la 2e division blindée du général Leclerc, la fameuse 2e DB. Sans doute ses 16 000 hommes (pour 5 000 véhicules) déploraient-ils de ne pas avoir été en première ligne dès le 6 juin, mais ils se rattrapèrent, car, dans les 24 jours qui suivirent, la 2e DB participa à la percée d’Avranches, puis mena l’attaque par Le Mans, Alençon, Chartres, Rambouillet, avant de faire une entrée triomphale dans Paris.

Musée du Débarquement d’Utah Beach

Installé dans les dunes depuis 1962, ce musée généraliste évoque les forces en présence à la veille du D-Day, et met en relief l’intérêt stratégique du site pour les Alliés. On peut y admirer un bombardier B26 Marauder, connu pour opérer à basse altitude.

Pointe du Hoc, les rangers à l'assaut de la falaise

Point hautement stratégique du mur de l’Atlantique situé entre Omaha Beach et Utah Beach, la pointe du Hoc a été le théâtre de l’une des plus sanglantes batailles du Débarquement, dont elle porte aujourd’hui encore les stigmates.
Point hautement stratégique du mur de l’Atlantique situé entre Omaha Beach et Utah Beach, la pointe du Hoc a été le théâtre de l’une des plus sanglantes batailles du Débarquement, dont elle porte aujourd’hui encore les stigmates. © Jérome Houyvet

On peut s'aventurer à marée basse au pied de la falaise recouverte d'une végétation abritant les nids d'oiseaux marins. Du sommet, on domine les flots. C'est ici que la violence du Débarquement demeure la plus visible. Les photos aériennes du site font penser à un terrain de golf aux reliefs diaboliques. En réalité, ce sol jonché de cratères résulte du bombardement d’un cuirassé de marine, complété par une attaque aérienne. L’état- major allié avait mis les grands moyens ! Et pour être bien certain que les canons ne menaçaient plus les plages normandes du Débarquement, on envoya un commando pour escalader les falaises. La fumée des bombardements n'était pas dissipée, lorsque neuf barges débarquèrent au pied de la pointe.  Les 225 hommes du 2e bataillon encore valides. L’horreur de la réalité, ce sol jonché de cratères résulte du bombardement d’un cuirassé de marine, complété par une attaque aérienne. L’état- major allié avait mis les grands de rangers du lieutenant-colonel James Rudder se ruèrent sur
la falaise quasi verticale, haute de 30 mètres. Sous une pluie de de grenades, ils lancèrent des fusées grappins qui tendirent des cordes contre la roche lisse et glissante ; ils assemblèrent des échelles démontables et montèrent à l'assaut. Ce fut un carnage au corps-à-corps. Et lorsque les casemates allemandes cessèrent le feu, seuls 95 rangers étaient encore valides. L'horreur de la situation leur apparut alors, voyant que les canons tant redoutés n’existaient pas! Ce qui n’empêcha pas une violente riposte allemande, qui dura jusqu’au 8 juin.

Batterie de Maisy

La reconstitution de ce site de 44 hectares permet de parcourir 2,5 kilomètres de tranchées qui desservaient casemates et pas de tir.

Omaha Beach, entre marée montante et défenses imprenables

Cimetière militaire américain en Normandie avec des croix blanches alignées près de la plage de Omaha Beach
© Bertrand Rieger / Détours en France

Il existe une seule façon de visiter ce site, c'est d'entrer dans le cimetière militaire américain de Colleville et se diriger vers sa partie centrale. Là, alignes au cordeau, des centaines de croix identiques, taillées dans du marbre de carrare blanc, portent le nom de ces hommes morts au combat. Dire que la plupart de ces jeunes Américains n’auront connu de la France que les vagues de la Manche, le sable et les galets de la plage, et parfois la verdure de son bocage... Au bout de la nécropole, côté mer, sous de grands pins maritimes, un belvédère domine cette plage du Débarquement, avec une table d’orientation qui matérialise les différents secteurs du Débarquement. Un escalier permet de rejoindre le rivage. Si la marée est basse, on marchera vers la mer jusqu'à se trouver sur une levée de galets. De là, côté terre, on voit les escarpements du rivage et on distingue des blockaus ; côté mer, si le flot est commencé, on perçoit la vague qui se rapproche. On se retrouve alors en condition pour imaginer ce qui se passa ici le 6 juin 1944... À 6h30, alors que les premières vagues d’assaut se préparaient à jaillir, les bombardements aériens étaient supposés avoir réduit les batteries côtières au silence. Mais les avions avaient manqué leurs cibles. Plus grave, l’état-major allié n’avait pas reçu l’information selon laquelle une division de 12000 Allemands venait d’être positionnée sur la côte. Sous un feu nourri, et dans l’impossibilité pour les blindés de franchir le cordon de galets, les attaques successives échouèrent et se trouvèrent immobilisées avec la marée montante sur les talons... C'est en fin de matinée qu'une percée fut réussie vers Verville, à l'ouest de cette plage du Débarquement, tandis que deux destroyers approchèrent au plus près du rivage pour tirer au canon sur les blockhaus. Alors, une charge désespérée permit d’approcher les bunkers. Dans l’après-midi, Omaha Beach était américaine, au prix de 3000 morts... Tout de suite commençait le montage d’un port artificiel: le Mulberry A, qu’une tempête devait détruire moins de quinze jours plus tard.

Sites incontournables à visiter

Gold Beach et Arromanches, un port anglais en pièces détachées

Vestiges du port artificiel d'Arromanches flottant sur une mer calme au coucher du soleil
© Bertrand Rieger / Détours en France

Sur la côte au nord de Bayeux, le poste de commandement de la batterie allemande de Longues-sur-Mer, à 70 mètres au-dessus de la Manche, offre une vue d'ensemble sur le théâtre d'Overlord. Comme le site est demeuré intact, avec les canons dans leurs bunkers, le cadre a de quoi impressionner les visiteurs. Dans l’ouest s’étend Omaha Beach. À l’est, Arromanches-les-Bains et les plages normandes qui se succèdent jusqu’à l’estuaire de la Seine. Et le drame de ce front nous apparaît clairement, car le duel entre les défenses allemandes et les forces alliées combinant marine et aviation aura un coût terrible pour les civils. D’autant plus que, pour des raisons stratégiques évidentes, il n’était pas question d’alerter la population à l’avance... Telle fut la tragédie de Gold, Juno et Sword, le secteur britannique du Débarquement. En arrivant sur les plages d’Asnelles et de Ver-sur-Mer, la 50e division d’infanterie anglaise avait pour mission d’effectuer immédiatement un mouvement tournant vers l’ouest, afin de s'emparer d'Arrocmanches par la terre. Ainsi, le site serait pris intact, et les Alliés pourraient y installer au plus vite le port artificiel dont les éléments étaient en train de traverser la Manche : le Mulberry B. Le 7 juin au matin, les habitants d'Arrocmanches, éberlués, virent arriver du large les Phoenix, gigantesques caissons flottants en béton, longs de 70 mètres et hauts de 20. Ils furent positionnés et coulés de façon à ceinturer la plage de quatre digues ménageant trois entrées. À l’intérieur du plan d’eau furent placés des pontons flottants maintenus par des piliers fixés au fond de l’eau, sur lesquels ils coulissaient pour suivre la marée. Entre les pontons et la plage furent ensuite installées des chaussées flottantes. Ainsi naquit ce qui fut rapidement baptisé « Port Winston ». Ce port vit passer un trafic quotidien équivalent à celui que connaissait le port du Havre avant-guerre! Mais tandis qu’Arromanches se construisait, l’assaut se poursuivait vers l’ouest, pour prendre Bayeux et établir la liaison avec les troupes débarquées à Omaha Beach. Dans le même temps, en toute discrétion, un commando progressait vers Port-en-Bessin pour une mission particulière. 

Musée America Gold Beach

Ce lieu met en lumière le rôle des services des renseignements.

Musée du Débarquement

Des films et une remarquable série de maquettes et dioramas.

Mémorial de Caen

Une introduction pédagogique et richement documentée à la découverte des hauts lieux du Débarquement.

Sources

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