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Foirail dans le Brionnais : dans l'arène des enchères bovines

Vue aérienne de l'enclos à bétail au marché aux bovins de St-Christophe-en-Brionnais, l'un des plus anciens et des plus grands de France. Vue aérienne de l'enclos à bétail au marché aux bovins de St-Christophe-en-Brionnais, l'un des plus anciens et des plus grands de France. - © Manuel Cohen / Détours en France

Publié le par Philippe Bourget

En Saône-et-Loire, chaque mercredi, à Saint-Christophe-en-Brionnais, se tient le marché de gros des bovins, l’un des plus importants de France. Un rituel datant du XVe siècle qui transforme le village en immense agora marchande, avec toutes les images fortes inhérentes au commerce paysan…

Dans l’arène

Le marché aux bovins hebdomadaire de St-Christophe-en-Brionnais en Saône-et-Loire,
© Manuel Cohen / Détours en France

Une assemblée d’hommes assis dans l’hémicycle du « cadran », la salle de vente aux enchères. Des acheteurs, des vendeurs, certains en blouses longues noires ou bleues de maquignons. Ici ou là, une fumée de cigarette, en dépit de l’interdit. Des paires d’yeux attentives, qui passent de la « piste aux bovins » à l’écran géant, où s’affichent le lot et les enchères montantes annoncées par le speaker derrière sa baie vitrée. Michel, le bouvier dans l’arène, présentant les bêtes en évitant les coups de cornes ou de sabots. « Je fais ça depuis toujours car personne n’a envie d’être à ma place ! », sourit-il, visage carré, un long bâton de bois à la main. Dans les coulisses du marché, des couloirs de circulation pour vaches et taureaux, des grilles, des barrières métalliques qui claquent... L’odeur de purin. Des meuglements de peur. Un bouvier : « Allez, allez, allez, allez, on suit ! », crie-t-il aux bêtes pour qu’elles avancent dans les corridors. À l’entrée du vaste hangar de tri, des paysans attendent de pouvoir débarquer leurs bovins des camions de transport. Comme Pascal, éleveur de broutards (veaux de moins d’un an) dans la vallée de l’Azergues. « Je les vends ici à des acheteurs-exportateurs. Ils partent en Italie pour être engraissés et sont en général abattus là-bas », dit-il.

 

Des bêtes françaises

Le marché hebdomadaire aux bestiaux de St-Christophe-en-Brionnais en Saône-et-Loire
© Manuel Cohen / Détours en France

Macaronées (numéros de lots collés sur le dos), les bêtes se présentent à l’entrée du cadran. Dans le Brionnais, c’est le matin, temps consacré au négoce des bovins de moins de deux ans, en majorité des charolais. Retour dans la salle de vente. L’écran affiche les numéros des départements d’origine, 42,71, 03 et 23 le plus souvent, parfois des 04 et des 05 venus des Alpes. « 85 % des lots vendus le matin partent à l’export pour l’engraissement, en Italie, Espagne et Allemagne », explique Daniel Bourachot, guide bénévole sur le marché, qui accompagne les groupes de visiteurs. Arrive un taureau de réforme, soufflant, énervé, exception dans cette pouponnière matinale. 1 000 kg sur la balance. Vendu 2 700 euros.

 

Le mur d’argent

La salle de vente du marché aux bovins de St-Christophe-en-Brionnais en Saône-et-Loire,
© Manuel Cohen / Détours en France

Dans la salle, vendeurs et marchands, roués, en ont vu d’autres. Comme Jean-Claude Godard. « Mon père était emboucheur. Je viens là depuis gamin, j’ai connu l’époque du mur d’argent », s’amuse le sémillant sénior derrière sa moustache retroussée. Car avant, les transactions s’effectuaient au-dehors, les acheteurs ouvraient leurs valises de billets et les déposaient sur un mur, d’où le nom. Chaque mercredi à 12 h 30, on peut encore voir ce type d’échanges sous la halle, avec le marché de gré à gré des animaux prêts à être abattus. Juste avant que ce petit peuple ne se retrouve au Mur d’argent, le bar-restaurant le plus près du marché, pour déguster une entrecôte et boire un verre de Viré-Clessé.

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