Chablis : porte d'or de la Bourgogne
Chablis est une microrégion à proximité d’Auxerre. Cette appellation viticole, où s’épanouit le cépage chardonnay, produit un vin blanc à la minéralité inégalée. Chablis est un paradis pour épicuriens, ses paysages vallonnés et sa gastronomie constituent une superbe mise en bouche avant de découvrir le reste de la Bourgogne.
Cha-blis. Ces deux syllabes résonnent aujourd’hui dans le monde entier comme synonyme de grands vins blancs secs par excellence. Issu du seul cépage chardonnay, ce vin à la robe aux reflets or vert, souvent imité, jamais égalé, est apprécié pour sa minéralité sans pareille. « Le chablis, qui ne connaît pas ? C’est un vin qui a su facilement séduire car il est frais, discret et élégant en bouche, et s’associe avec quantité de mets – il ne charge pas le palais et ne masque pas les saveurs des plats. Tout le monde nous l’envie. Et pourtant, beaucoup de gens sont incapables de situer Chablis sur une carte »,regrette Françoise Roure, du Bureau interprofessionnel des vins de Bourgogne. Sa renommée est pourtant ancienne. Depuis le port d’Auxerre, le chablis arrivait jadis via l’Yonne puis la Seine sur toutes les grandes tables parisiennes. Avant d’être anéanti par le phylloxéra et d’autres maladies à la fin du XIXe siècle. « Il va connaître une renaissance à partir des années 1950-1960 grâce à des vignerons audacieux qui innovèrent dans le négoce, la mécanisation ou encore des procédés contre les gels printaniers, fléaux de la région. Il y avait 500 hectares dans les années 1950, les vignerons ne vivaient plus. On en compte 5 400 aujourd’hui ! »
À la découverte du Chablisien
Que l’on soit œnophile ou non, le Chablisien mérite à lui seul un voyage. Cette petite bulle viticole – de 20 kilomètres sur 15 kilomètres – , qui surgit à l’entrée de l’Yonne, a bien mérité son surnom de « porte d’or de la Bourgogne ». Sous vos yeux alternent coteaux hérissés de vignes et vergers verdoyants qu’il faut voir au printemps lorsque les cerisiers en fleurs explosent. Cerné par la forêt, ce paysage légèrement vallonné épouse le lit du Serein. « Il y a quelque chose de réconfortant, de très doux dans ce paysage, c’est presque un cocon, vante Camille Juillard, du domaine viticole Laroche. Au milieu de ses collines, il y a toujours un clocher qui s’élève au-dessus de la mer de vignes. On y trouve un camaïeu de couleurs sans cesse changeantes au cours des saisons. Un monde confiné, à part, quand on vient d’Auxerre ou de Tonnerre. » Au cœur de cette région, le bourg de Chablis, traversé par le Serein, a gardé – bien qu’en partie détruit en 1940 – un cachet admirable, avec ses solides maisons coiffées de tuiles brunes ou orangées. La petite ville, 2 400 habitants, a conservé la porte Noël, deux tours fortifiées du XVIIIe siècle, un hôtel-Dieu et la collégiale Saint-Martin, dont la silhouette actuelle remonte au XIIIe siècle. Cette collégiale fut à l’origine fondée par les chanoines de Saint-Martin-de-Tours, qui, fuyant les Normands, élevèrent ici un sanctuaire pour accueillir les reliques du saint. Son portail latéral est recouvert de fers à cheval, des ex-voto offerts par les pèlerins au « patron des cavaliers ». À côté de l’église, n’hésitez pas à découvrir le domaine viticole Laroche, installé dans l’ancienne obédiencerie. Dans ses vastes et sombres caves se niche la petite crypte, qui abrita, de 877 à 887, les reliques de saint Martin. Le domaine a également conservé un impressionnant pressoir en bois du XIIIe siècle.
La capitale du Chablisien et son patrimoine historique
Autour de la capitale du Chablisien, c’est un bonheur de rouler sur les tranquilles routes départementales serpentant à travers le vignoble. Il faut voir les villages de pierre pâle : Lignorelles, Courgis ou Préhy, connu pour sa charmante église Saint-Pierre, s’élevant, solitaire, au milieu des vignes. Béru vaut, lui, le détour pour son château, qui a conservé de belles fortifications médiévales. Plus loin, en longeant la vallée du Serein sur la D91, vers le nord, on peut admirer, au bout d’une longue allée de tilleuls, l’abbaye de Pontigny. Construite en 1114, elle est la deuxième des quatre premières filles de Cîteaux et possède la plus grande église cistercienne du monde ! Immense, ses lignes sont épurées, sa nef particulièrement lumineuse. « Son église longue de 120 mètres se distingue par l’adoption très précoce des innovations du gothique et son chœur entouré d’un déambulatoire ouvrant sur des chapelles rayonnantes », note l’historienne Terryl N. Kinder, spécialiste de Pontigny, installée en Bourgogne. Les moines qui y vécurent jusqu’à la Révolution ne sont pas pour rien dans le développement du vignoble.
Des spécialités gourmandes à déguster avec un verre de Chablis
Mais le plus étonnant, dans cette microrégion, c’est sa large palette de spécialités gourmandes, qui semblent toutes nées pour accompagner le vin. Il suffit de se rendre le dimanche matin, rue Auxerroise, au marché bourguignon de Chablis, réputé dans toute l’Yonne, pour s’en rendre compte. Sur les étals, c’est une explosion de couleurs et de saveurs de l’Yonne. Outre les vins, vous y dégusterez une fameuse andouillette de Chablis, du jambon à la chablisienne, des fromages au chablis ou encore les biscuits Duché – des petits gâteaux très secs et sucrés, concoctés aujourd’hui par le boulanger Mickaël Body. À tremper dans un verre de Chablis, évidemment !