Détours en France : Rêver et visiter, apprendre et voyager, se divertir et voir la France autrement

Bayonne : le circuit gourmand à tester absolument

Surplombés de splendides façades aux volets multicolores, les quais de la NIve sont l’occasion d’une agréable balade dans le Bayonne historique. L’occasion aussi de boire un verre ou de déguster de bons petits plats en terrasse. Surplombés de splendides façades aux volets multicolores, les quais de la NIve sont l’occasion d’une agréable balade dans le Bayonne historique. L’occasion aussi de boire un verre ou de déguster de bons petits plats en terrasse. - © Stéphane Gautier / Détours en France

Publié le par Sophie Denis

Au confluent de l’Adour et de la Nive rayonne Bayonne, cité épicurienne par excellence. Porte d’entrée d’un terroir fertile, il affiche un patrimoine urbain remarquable que l’on prendra le temps de savourer au fil d’un circuit gourmand au programme réjouissant. 

Certaines villes se découvrent au pas de course. Ce n’est pas le cas de Bayonne, qui suggère de prendre son temps. D’abord, celui de ne rien faire. Il suffit de la regarder vivre, quand elle s’admire dans les eaux paresseuses de la Nive, ses hautes façades pressées les unes contre les autres, alignées de pans de bois et de fenêtres de travers.

Les halles, à voir

Notre voyage gustatif commence rive gauche, sur la très animée place Morlesin- Carreau des halles, où se tient le grand marché couvert de la ville.
Notre voyage gustatif commence rive gauche, sur la très animée place Morlesin- Carreau des halles, où se tient le grand marché couvert de la ville. © Stéphane Gautier / Détours en France

Profitez de Bayonne en commençant par choisir une terrasse, celle où vous allez procrastiner en comptant les volets rouges, bleus, verts, qui enjolivent les quais de la Nive. Par exemple, rive droite, avec en face de vous la perspective des deux flèches de la cathédrale Sainte-Marie, qui materne la ville depuis le XIIIe siècle ; à moins que vous ne préfériez rive gauche, du côté des halles.

Vue depuis le vieux centre sur l’une des deux flèches de la cathédrale Sainte-Marie, construction gothique datant du xiiie siècle. Hautes de plus de 80 mètres, celles-ci ont été achevées au cours du xixe
Vue depuis le vieux centre sur l’une des deux flèches de la cathédrale Sainte-Marie, construction gothique datant du XIIIe siècle. Hautes de plus de 80 mètres, celles-ci ont été achevées au cours du XIXe. © Stéphane Gautier / Détours en France

C’est là que tout commence, le matin avec un café et le journal Sud-Ouest, le marché en sus le samedi ; mais là où tout finit aussi, autour d’une chiffonnade de jambon Ibaïama et d’un verre d’irouléguy, quand le soleil couchant fait rosir les façades du Petit Bayonne. L’endroit idéal pour avoir une petite faim.

Pour titiller vos papilles, vous pouvez compter sur Sylvie Berteaux. Après Bordeaux et La Rochelle, celle qui se définit comme une « épicurieuse » vient d’ouvrir un itinéraire gourmand au cœur de la ville, autour de six dégustations triées sur la fourchette. « Ici, on a le choix : la mer, la campagne et la montagne vous offrent le meilleur dans un mouchoir de poche », raconte-t-elle. Sylvie défend depuis des années un tourisme écoresponsable, qui privilégie les circuits courts et une agriculture raisonnée. La preuve par les miels de Jacques Salles, à découvrir rue d’Espagne. La boutique Loreztia, « douceur de fleur » en basque, annonce la couleur avec son slogan « Je butine à Bayonne ». Issu d’une famille d’agriculteurs, Jacques Salles possède 200 ruches réparties au Pays basque, dans le Béarn et les Landes : « Entre océan et montagnes, nous avons une diversité florale exceptionnelle. » À ses produits, Jacques ajoute des miels venus d’Espagne, récoltés chez des apiculteurs qui partagent les mêmes exigences. Sur la trentaine de variétés, nous en goûtons quatre en commençant par l’acacia, le plus basique ; puis le mille- fleurs, tout en douceur ; le châtaignier, sombre et corsé ; et un surprenant miel d’oranger venu de Navarre. « Comme le vin ou l’huile d’olive, le miel connaît de grandes variations de saveurs et de densité, en fonction de la météo et du terroir », nous informe notre hôte. Seule ombre au tableau, être apiculteur n’est plus une sinécure, entre pesticides, frelons asiatiques et météo déréglée... « Aujourd’hui, un apiculteur qui part en retraite n’arrive plus à vendre ses ruches », reconnaît-il.

installé depuis 1993 dans la très commerçante rue d’Espagne, Jacques Salles nous invite à déguster une sélection de miels aussi variés que savoureux. Sa boutique Loreztia, située au n°58dela rue, propose également des confitures et sauces fruitées artisanales.
Installé depuis 1993 dans la très commerçante rue d’Espagne, Jacques Salles nous invite à déguster une sélection de miels aussi variés que savoureux.<br /> Sa boutique Loreztia, située au n°58 de la rue, propose également des confitures et sauces fruitées artisanales. © Stéphane Gautier / Détours en France

Visiter le pays du chocolat

’Atelier du Chocolat, fondé en 1951, propose un parcours- découverte d’une heure et demie avec dégustation.
L’Atelier du Chocolat, fondé en 1951, propose un parcours- découverte d’une heure et demie avec dégustation. © Stéphane Gautier/ Détours en France

La rue Port-Neuf est réputée pour ses chocolatiers et ses maisons à arcades, construites sur pilotis. Ici, au Moyen Âge, il fallait gagner du terrain sur les zones inondables. D’abord, des pieux dans le sol, puis des arceaux en guise de soutien, ont servi de base aux habitations. Le chocolat est arrivé un peu plus tard, au début du XVIIe siècle, dans les bagages des juifs espagnols et portugais fuyant l’Inquisition. La maison Cazenave, fondée en 1854, en est une des plus belles vitrines, avec sa boutique bonbonnière, décor délicieusement suranné de vitraux, miroirs et boiseries du début du xxe. « Nous avons aussi gardé les machines centenaires, explique Florian Benac, mais allégé en sucre les recettes. Et le passage au bio s’est fait en 2018. » Dans un souci de développement durable, les coques des 800 tonnes de fèves utilisées chaque année servent à pailler le jardin botanique.

Florian Benac, de la Maison Cazenave, nous sert le chocolat chaud maison, préparé à la main avec un mousseur, petit instrument en bois.
Florian Benac, de la Maison Cazenave, nous sert le chocolat chaud maison, préparé à la main avec un mousseur, petit instrument en bois. © Stéphane Gautier / Détours en France

C’est un rituel, presque une messe. Présenté dans le traditionnel service de porcelaine de Limoges à motifs de roses, le chocolat chaud de la Maison est irrésistible avec son côté mousseux inimitable. « On l’obtient toujours à la main, avec un petit instrument de bois que l’on nomme “mousseur”. Il a été utilisé la première fois par “la Molina”, une servante d’origine mexicaine qui préparait la boisson préférée de l’infante Marie-Thérèse lors de son mariage en 1660. » Au Pays basque sud, on le préfère avec de la cannelle, alors qu’à Bayonne, il est plus fort en cacao, avec une petite pointe de vanille : à peine sucré, cacaoté comme il faut, c’est réconfortant comme un tendre souvenir d’enfance.

Fromages en circuit court

Dégustation de fromages frais artisanaux et locaux à la laiterie Marengo.
Dégustation de fromages frais artisanaux et locaux à la laiterie Marengo. © Stéphane Gautier / Détours en France

Sylvie est fière d’avoir découvert une pépite dans le Petit Bayonne. Dans cet ancien quartier de pêcheurs et de tonneliers, avant l’arrivée des Basques espagnols fuyant le franquisme, la devanture d’un bleu et d’un blanc lumineux claque sur la pierre crème des façades. Ouvert en 2022, le lieu abrite la laiterie Marengo. Laurent Gonthier et Romain Plateau y fabriquent des fromages frais artisanaux à partir de lait de vache bio. « Nous privilégions les circuits courts. Le lait vient d’Urcuit, à 14 kilomètres d’ici », précise Romain. Mozzarella, burrata (mozzarella avec de la crème), stracciatella (cœur de la burrata) se succèdent dans nos assiettes. Le goût n’a rien à voir avec les produits qu’on consomme habituellement. «Ils ont été faits hier, donc ont plus de saveur. Ces produits perdent beaucoup si on les consomme au-delà de 48 heures », avertit Laurent. Pour changer des habituelles salades d’été, il conseille d’associer la burrata à une salade de nectarines à l’huile d’olive ou à un gaspacho. Et le lait de brebis dans tout ça ? « Nous cherchons un producteur, toujours en circuit court. » La laiterie propose aussi un atelier pour apprendre à faire sa mozzarella.

Retour dans le cœur historique du Grand Bayonne, dans sa partie haute. Érigée sur une butte entre le XIIIe et le XIXe siècle, la cathédrale Sainte-Marie mérite une halte pour ses vitraux Renaissance et son cloître où flamboie le gothique. Nichée dans une petite rue derrière, la boutique de Cédric Duplessis offre une jolie surprise, celle d’un fumoir où il travaille saumons d’Écosse, anguilles, maquereaux, bonites et truite de Baïgorry, un produit local. Ce fils de pêcheur breton, qui se destinait à être ingénieur, a préféré lancer une activité artisanale respectueuse de l’environnement. Il alimente notamment son fumoir avec des copeaux de platane issus de la fabrication des palas de pelote ! Son saumon fumé à basse température, rehaussé d’une pointe de sel de Salies-de-Béarn, est un miracle de douceur et d’équilibre en bouche.

la Maison Duplessis dispose d’un atelier fumoir où les salage, séchage et fumage de saumons d’Écosse label rouge sont réalisés sur place de façon artisanale.
La Maison Duplessis dispose d’un atelier fumoir où les salage, séchage et fumage de saumons d’Écosse label rouge sont réalisés sur place de façon artisanale. © Stéphane Gautier / Détours en France

Cochons en liberté

Le Grand Bayonne, ce sont aussi d’étroites ruelles pavées ponctuées ici et là de bonnes tables, à l’image de la charmante rue Poissonnerie.
Le Grand Bayonne, ce sont aussi d’étroites ruelles pavées ponctuées ici et là de bonnes tables, à l’image de la charmante rue Poissonnerie. © Stéphane Gautier / Détours en France

Le jambon est ici une religion. La preuve par la Maison Aubard, à l’angle de la rue Poissonnerie et des halles. Charcuterie depuis 1946, elle en est à la troisième génération de groupies du cochon, représentée par Cédric Bergez, ancien rugbyman, et son épouse Guylaine. Autre particularité, la maison affine son jambon dans le séchoir du quartier Saint-Esprit, ouvert par le grand-père. C’est là que, bercés par les vents, les jambons IGP Ibaïama acquièrent leurs arômes pendant douze mois, voire dix-huit pour les meilleurs. « La roll’s du jambon, c’est le Kintoa, s’émerveille Sylvie. Vous voyez ce gras ? Il rappelle le lard de Colonnata. Et goûtez-moi cette chair persillée et fondante. Elle a un incroyable goût de noisette. » Il faut dire que le porc Kintoa, de la race pie noire, vit en liberté dans la vallée des Aldudes, au pied des Pyrénées, et se nourrit de châtaignes et de glands pendant quinze mois. Son jambon est ensuite affiné vingt mois et n’a rien à envier au pata negra.

on se régale des jambons Ibaïama IGP de la Maison Aubard, charcuterie familiale située rue Poissonnerie.
On se régale des jambons Ibaïama IGP de la Maison Aubard, charcuterie familiale située rue Poissonnerie. © Stéphane Gautier / Détours en France

Pour clore la balade, Sylvie nous ramène aux halles, chez Bayonne Marée. Grégory nous y attend avec une dégustation de bulots, crevettes et une poêlée de chipirons, ces petits calamars qu’on pêche à la turlute et qu’on mange avec les doigts, revigorés par une pincée de piment d’Espelette. La vie est douce à Bayonne. On egin ! 

Dernière étape, Bayonne Marée, poissonnerie au cœur des halles qui propose de délicieux plateaux de fruits de mer.
Dernière étape, Bayonne Marée, poissonnerie au cœur des halles qui propose de délicieux plateaux de fruits de mer. © Stéphane Gautier / Détours en France
Sources

Sujets associés