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Plongez à la découverte des trésors des lagons de la Réunion

Protégée par un récif corallien, la plage de Saint-Gilles à Hermitage-les-Bains est propice à de longues séances de snokerling (plongée avec masque, tuba et palmes) pour découvrir sa foisonnante biodiversité marine composée de centaines d'espèces. Protégée par un récif corallien, la plage de Saint-Gilles à Hermitage-les-Bains est propice à de longues séances de snokerling (plongée avec masque, tuba et palmes) pour découvrir sa foisonnante biodiversité marine composée de centaines d'espèces. - © Bertrand Rieger

Publié le par Jean-François Bègue

L’évocation d’une île tropicale s’accompagne inévitablement d’un florilège d’images idylliques : lagons aux eaux transparentes, plages de sable blanc bordées de cocotiers... Sans être mensongère, cette vision de carte postale serait bien réductrice appliquéeà La Réunion. Ici, l’union du feu et de l’eau a modelé des paysages littoraux portant les cicatrices d’un affrontement perpétuel. Mais le plus étonnant des spectacles se découvre sous l’eau... en compagnie d’une myriade de poissons, tortues, dauphins et baleines.

Le fait est un peu surprenant, mais les Réunionnais n’entretiennent pas un lien très fort avec l’océan, comme peuvent le vivre les populations des îles du Pacifique. Pour certains, il est même une frontière, il effraye. Il est vrai que le pourtour de l’île, jalonné de petits oratoires, révèle aux visiteurs le danger en cas de fortes houles. Et les générations passées ne s’adonnaient guère au bronzage, qui se faisait naturellement durant le travail au champ. Quant à savoir nager... Les seuls usagers de la mer étaient les pêcheurs et, depuis le développement balnéaire il y a une cinquantaine d’années, les touristes.

Un pêcheur installé sur les roches basaltiques d'origine volcanique au sud de Saint-Leu, à Étang-Salé-les- Bains, un charmant village de pêcheurs
Un pêcheur installé sur les roches basaltiques d'origine volcanique au sud de Saint-Leu, à Étang-Salé-les- Bains, un charmant village de pêcheurs. © Bertrand Rieger

Pourtant, les rivages de l’océan Indien réservent d’incroyables rencontres. Seule la côte ouest, dite « côte-sous-le-vent », région comprise entre Saint-Pierre et Saint-Paul, a bénéficié de conditions favorables à la structuration de lagons. Une vingtaine de kilomètres de barrières renferme une faune exceptionnelle : L’Hermitage/La Saline, Saint- Leu et Saint-Pierre. Ces lieux abrités des courants marins concentrent une palette d’activités nautiques autour d’une réserve marine. Snorkeling, kayak, kite-surf, paddle se pratiquent en sécurité dans les différents lagons. Au-delà, la plongée est une expérience ludique et sécurisée.

La côte sauvage du Baril, village de la commune de Saint-Philippe, s'étend sur la partie sud de l'île et une grande partie du massif volcanique.
La côte sauvage du Baril, village de la commune de Saint-Philippe, s'étend sur la partie sud de l'île et une grande partie du massif volcanique. © Bertrand Rieger

Le "petit peuple" des lagons

le récif corallien du lagon de l'Hermitage, sur la côte ouest de l'île, à Saint-Gilles, dans la commune de Saint-Paul.
Le récif corallien du lagon de l'Hermitage, sur la côte ouest de l'île, à Saint-Gilles, dans la commune de Saint-Paul. © Bertrand Rieger

Plages de sable blanc, eau turquoise et lagons occupent un dixième du littoral où l’on peut tranquillement s’adonner au bronzage en sirotant un jus d’ananas, mais pas forcément à l’ombre des palmiers. La végétation littorale a été modifiée. Il faudra redoubler de prudence avec les insolations d’un soleil mordant. Surtout si vous prenez masque, palmes et tuba, l’exploration de ce récif si riche risque fort de perdurer. À quelques mètres du bord, la biodiversité s’expose tel un aquarium géant. Des poissons par dizaines, de toutes tailles, aux formes originales et couleurs éclatantes tournoient dans tous les sens. Par endroits, à l’image de gros champignons, des patates de coraux se superposent en strates multicolores. Une petite murène se cache par-là. Si vous voulez la rencontrer, il faudra rester immobile malgré les remous. Un exercice pas si simple !

Environ 1200 espèces de poissons et presque autant de mollusques évoluent dans les lagons réunionnais ou aux tombants de ses récifs. En 2007 a été créée la Réserve naturelle marine de La Réunion, qui couvre une surface de 35 km2 s’étendant du cap la Houssaye (Saint- Paul) à la Roche aux Oiseaux à l’Étang-Salé. La Réserve propose un « Sentier sous-marin écotouristique » qui révèle un écosystème unique, abritant plus de 3500 espèces marines. Équipé d’un masque, d'un tuba et d’une paire de palmes, accompagné d’un guide, vous glissez dans les eaux du lagon de l’Hermitage (lire encadré ci-contre).

Baignade immersive

Dans le récif corallien du lagon de l'Hermitage, vous aurez peut-être la chance de croiser une tortue verte (Chelonia mydas), qui pèse généralement entre 80 et 130 kg.
Dans le récif corallien du lagon de l'Hermitage, vous aurez peut-être la chance de croiser une tortue verte (Chelonia mydas), qui pèse généralement entre 80 et 130 kg. © Bertrand Rieger

Nul besoin de se transformer en homme-grenouille adepte des plongées profondes pour découvrir le monde du silence de l’île Bourbon, un simple équipement masque-tuba-palmes suffit. On appelle cela le snorkeling. Parmi les nombreux spots lagonaires de la côte ouest, celui du lagon de l’Hermitage est le plus vaste, le mieux préservé et le plus sûr. Il débute au sud de Saint-Gilles, face à une plage de sable blanc bordée de filaos. À quelques petits mètres sous la surface de l’eau, récifs et herbiers offrent sans effort un ballet de poissons papillons, bénitiers, balistes Picasso, chirurgiens, nudibranches, idoles des Maures, murène étoilée... Plus discrètes, tortues vertes et raies aigles sont également observables, à condition que vous soyez tout aussi effacé. Et surtout que vous respectiez une pratique responsable et écologique du snorkeling : ne pas piétiner les récifs de coraux et les herbiers marins, ne pas nourrir ni poursuivre ou tenter de toucher la faune marine, ne rien ramasser.

La biodiversité en danger (requins...)

Tout ne va pourtant pas pour le mieux dans le monde aquatique réunionnais. Par endroits, les coraux ont perdu leurs éclatantes couleurs au profit d’une blancheur attestant d’une mauvaise santé. En cause, le réchauffement climatique, mais aussi la surfréquentation des bateaux, les flux de pollution des bassins-versants aujourd’hui très urbanisés. Des circonstances qui affectent le lagon et se répercutent bien au-delà. Ainsi, les eaux réunionnaises concentrent dorénavant des espèces de requins, autrefois peu présentes autour des côtes. Les requins-tigres et bouledogues semblent être devenus sédentaires. « Ces espèces aiment l’eau saumâtre, on ne les observait qu’en saison des pluies, lorsque les ravines sont en crue, quand les étangs débordent, les requins viennent près du bord, et moi... je les pêche », nous raconte un pêcheur à la gaulette. Les requins sont surtout un danger pour les surfeurs. Des filets de sécurité anti-intrusion des squales ont été installés sur les deux principales plages de l’île ouvertes sur l’océan, Les Roches Noires et Boucan Canot.

Un fascinant ballet

Une baleine à bosse, au large de la baie de Saint-Paul. Chaque année, ce cétacé vient mettre bas dans les eaux chaudes des côtes réunionnaises.
Une baleine à bosse, au large de la baie de Saint-Paul. Chaque année, ce cétacé vient mettre bas dans les eaux chaudes des côtes réunionnaises. © Stéphane Azouze / Hemis.fr

À La Réunion, il est possible toute l’année d’observer une grande diversité de mammifères marins. L’association Globice (globice.org), ONG dédiée à la science, œuvre depuis 2001 à la conservation des cétacés dans l’océan Indien; leurs nombreux programmes de recherche ont permis de recenser 22 espèces proches des côtes réunionnaises (sur 33 potentiellement présentes). Six espèces se donnent en spectacle toute l’année, à quelques centaines de mètres du rivage: dauphin commun, de Fraser, tacheté, d’Électre à long bec et Indopacifique. La Réunion se trouve aussi sur « la Route des baleines ». Entre juin et octobre, l’hiver austral ramène les baleines à bosse en convoi migratoire. En provenance de l’Antarctique, elles viennent se reproduire et donner naissance dans les eaux plus chaudes de l’océan Indien. La côte ouest de l’île est souvent le théâtre de ballets démonstratifs de ces mastodontes des mers. Une baleine mâle de 30 tonnes qui frappe d’un coup de nageoire pectorale la surface de l’eau, ou qui réalise un bond hors de l’eau, est des plus spectaculaires ! Plus douce est la gestuelle de la mère apprenant à son baleineau à « sonder » le fond, le mâle, en escorte, veillant à leur tranquillité. Pour assurer leur quiétude, une charte d’approche a été mise en place pour les usagers de la mer (cedtm-asso.org).

Sources

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