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Des vignes à Chambord

Depuis 2015, le domaine viticole de Chambord cultive en bio cinq cépages exposés plein sud (pinot noir, romorantin, sauvignon, orbois, gamay). Depuis 2015, le domaine viticole de Chambord cultive en bio cinq cépages exposés plein sud (pinot noir, romorantin, sauvignon, orbois, gamay). - © Tuul and Bruno Morandi / Détours en France

Publié le par Tuul Morandi

Cinq cents ans après sa construction, le château de Chambord renoue avec sa tradition viticole lancée par François Ier. Quatorze hectares de vignes ont été plantés, notamment avec du romorantin, un cépage royal unique. Récemment, un nouveau chai est venu couronner cette vigne patrimoniale.

Dans la brume matinale d'automne, Chambord apparaît dans toute sa démesure, comme dans un songe éveillé ou encore de notre enfance. On ne présente plus ce fleuron de la Renaissance française avec ses tourelles élancées et son escalier à double révolution, merveille d’ingénierie qui fait tourner les têtes. Les visiteurs du monde entier y accourent pour admirer son architecture et immortaliser ses lignes majestueuses qui se reflètent dans le Cosson, une vue devenue incontournable. Mais connaît-on cet autre panorama, celui depuis les vignes avec en toile de fond la silhouette de Chambord ?

Histoire d’un cépage

Depuis quelques années, le château renoue avec une tradition viticole aussi vieille que lui-même. Et c’est avec le retour du cépage romorantin que cette renaissance viticole démarre. Ce cépage unique est lui aussi né d’un caprice royal. En 1517, deux ans avant le début de la construction du château, en épicurien notable, François Ier avait fait venir 80 000 pieds de vigne depuis Beaune en Bourgogne pour les faire planter autour du château de sa mère, Louise de Savoie, sur la commune de Romorantin. S'adaptant particulièrement bien au sol sablo-argileux et calcaire
de la vallée de la Loire, les vignes avaient trouvé une terre d’accueil idéale pour s’épanouir. Le nouveau cépage était né et s’est répandu très vite dans la région. Mais contrairement au château
de Chambord, il n’est pas passé à la postérité comme un des héritages merveilleux de François Ier et, au fil du temps, concurrencé par le sauvignon, il s’est raréfié, au point de frôler la disparition. Aujourd’hui, seule l’appellation cour-cheverny, un vin blanc AOC ultra-confidentiel, fait encore perdurer le cépage du roi sur 58 hectares de terre englobant les 11 communes d’origine de la cour royale. Le domaine viticole du château même, quant à lui, avait disparu, délaissé peu à peu après la Révolution et ravagé par la crise du phylloxéra.

ll a fallu attendre 2015 pour le voir renaître sur ses terres d’origine, lorsque Jean d’Haussonville, alors directeur de Chambord, décide de relancer l’activité viticole dans sa mission de conservation du patrimoine et du terroir local. « On s’est associé avec Henry Marionnet, le très réputé vigneron du Loir-et-Cher, qui travaille notamment les cépages oubliés de Touraine. Il possédait une vigne de romorantin non greffée et préphylloxérique, composée à 100 % de pieds d’origine. C’était notre chance. On a voulu les planter uniquement sur des parcelles d’anciennes vignes du château », se souvient Yann Saussereau, vigneron du domaine.

Un vignoble ressuscité

La ferme historique de l’Ormetrou, située à 2 kilomètres du château, accueille les premiers ceps. Le vignoble de Chambord, ainsi ressuscité, s’étend sur 14 hectares où s’épanouissent cinq cépages, dont le fameux romorantin sur 4 hectares, mais aussi le gamay, l’orbois, le sauvignon et le pinot noir. Et qui dit cépage dit vin et donc chai ! En 2022, l’ouverture d’un chai dans les bâtiments de la ferme parachève cette renaissance. Les cuvées royales, vendangées à la main et certifiés bio, y sont d’ores et déjà vinifiées. « C’est le vignoble du plus grand roi de la Renaissance. La qualité desvinsdoitêtreàlahauteur du prestige du château », affirme le vigneron. Le pari semble réussi, le nectar issu de ces « vignes patrimoine » fait « de très bons vins blancs de garde avec des arômes de fruits blancs et d’agrumes, et une belle rondeur en bouche », précise Yann Saussereau. Nouveauté, le millésime 2023 sera vieilli dans des fûts fabriqués à partir de chênes de la forêt de Chambord.

Sources

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