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Trois randonnées dans le Haut-Jura

Le Haut-Jura, terre de rando. Ci-contre, depuis le sommet du crêt de Chalam Le Haut-Jura, terre de rando. Ci-contre, panorama depuis le sommet du crêt de Chalam. - © Gilles Lansard / Détours en France

Publié le par Vincent Noyoux

Avec ses nombreux sentiers de randonnée, le Haut-Jura a de quoi séduire amateurs et adeptes de la randonnée. Entre cirque d'Orvaz, Crêt de Chalam ou Reculet et Crêt de la Neige, ne vous reste plus qu'à choisir selon votre niveau !

Balade facile sur la piste du cirque d’Orvaz

La combe d’Orvaz ? Parlons plutôt de cirque, et quel cirque ! De hautes falaises calcaires protègent une vallée encaissée où gambade une rivière, la Semine. Pour nous distraire en chemin, des jeux sur le thème... du cirque, forcément. Une belle rando à faire en famille, pour le bonheur des randonneurs en culottes courtes.

Au fond du cirque d'Orvaz, le petit hameau éponyme.
Au fond du cirque d'Orvaz, le petit hameau éponyme. © Gilles Lansard / Détours en France

Tous en piste ! Tel pourrait être le slogan de cette virée au cœur de la combe d’Orvaz. Cet amphithéâtre naturel est dessiné par deux larges falaises : d’un côté, la Roche Fauconnière, de l’autre les Roches d’Orvaz. Une petite rivière chantante, la Semine, coule au creux en direction du hameau d’Orvaz. Le long du cours d’eau, un sentier balisé en jaune a été aménagé pour les familles – comprenez pour les enfants. Depuis le parking au niveau du viaduc de la Semine (sur la route départementale D48), dix stations de découverte équipées d’un mobilier ludique sur le thème du cirque se proposent d’éveiller les enfants à la nature. Tour à tour, on se fait équilibriste, acrobate, dresseur, voltigeur pour comprendre le paysage en s’amusant. On fait tourner une roue inspirée des moulins qui jalonnaient la combe d’Orvaz au XIXe siècle... On prend place sur un gradin pour admirer la Roche Fauconnière, falaise dont la forme en demi-cercle évoque des ailes de faucon déployées... On apprend au passage que les couches calcaires autrefois souterraines, sont à présent mises à nu. Les numéros de cirque s’enchaînent ainsi, révélant les mystères de ce site remarquable.

Un camaïeu hypnotisant

Dix stations de jeu ponctuent le sentier allant de Belleydoux au viaduc d’Orvaz.
Dix stations de jeu ponctuent le sentier allant de Belleydoux au viaduc d’Orvaz. © Gilles Lansard / Détours en France

Dans le hameau d’Orvaz, on découvre le lavoir, le four, la fruitière. La plus belle partie du sentier part d’ici : le chemin court à travers des prairies fleuries en remontant vers les Roches d’Orvaz. La rumeur de la rivière, les sonnailles et les chants d’oiseau font un joli carillon. Bientôt, on approche des façades rocheuses, appréciées des chamois et des amateurs d’escalade. Labellisé Espace naturel sensible (ENS), le cirque d’Orvaz est remarquable pour sa qualité écologique et paysagère. De retour au hameau d’Orvaz, on suit la Semine, franchissant de petits torrents à l’aide d’un câble. La rivière, prise au jeu, coule le long de toboggans de pierre, s’agite dans des marmites naturelles : tout un cirque ! La rando se termine, mais il serait dommage d’en rester là. C’est que nous sommes restés en fond de vallée, c’est-à-dire à l’intérieur du chapiteau du cirque d’Orvaz... Pour prendre de la hauteur, il faut se rendre au belvédère des Roches d’Orvaz. Du haut de la falaise incurvée, le panorama est splendide. La forêt de feuillus et de résineux forme un camaïeu de verts hypnotisant. En face, la Roche Fauconnière domine la vallée de la Semine. Un paysage rural et verdoyant, typique du massif jurassien et du Haut-Bugey. Prudence en longeant la falaise, l’érosion a rendu la roche friable.

Point de vue sur les falaises et le vallon de la Semine depuis le sommet des Roches d'Orvaz (1 188m)
Point de vue sur les falaises et le vallon de la Semine depuis le sommet des Roches d'Orvaz (1 188m) © Gilles Lansard / Détours en France

Rando moyenne au crêt de Chalam

Cette boucle de difficulté moyenne traverse les géographies typiques du Haut-Jura. Combes allongées, crêts panoramiques, fermes isolées et forêts d’épicéas... Une borne frontière historique et le souvenir du maquis de l’Ain ajoutent de l’intérêt à cette sympathique traversée.

Une fois arrivés au sommet du crêt de Chalam, à 1545 m d’altitude, portez votre regard vers l’est. Là se hissent majestueusement le crêt de la Neige (1 720 m) et le Reculet (1 718 m).
Une fois arrivés au sommet du crêt de Chalam, à 1545 m d’altitude, portez votre regard vers l’est. Là se hissent majestueusement le crêt de la Neige (1 720 m) et le Reculet (1 718 m). © Gilles Lansard / Détours en France
Champs de soldanelles au bord du sentier. Ces fleurs à la douce teinte violette ouvrent leurs clochettes frangées dès la première fonte des neiges.
Champs de soldanelles au bord du sentier. Ces fleurs à la douce teinte violette ouvrent leurs clochettes frangées dès la première fonte des neiges. © Gilles Lansard / Détours en France

Le départ se fait au parking de la Borne-au-Lion, sur la commune de Chézery-Forens. Érigée en 1613, la borne marquait autrefois la frontière entre la France, la Franche-Comté (qui dépendait alors de l’Espagne) et la Savoie. Les écussons, hélas très effacés, montraient le lion de Franche-Comté, les trois lys du royaume de France et la croix de Savoie. Aujourd’hui, la vieille borne marque la frontière entre les départements du Jura et celui de l’Ain, où se trouve le crêt de Chalam que nous nous apprêtons à gravir.

Les tronçons les plus sportifs du parcours ont été aménagés pour faciliter l’ascension des marcheurs. Mais avec un dénivelé positif de plus de 500 m, partir à l’assaut du crêt de Chalam se mérite!
Les tronçons les plus sportifs du parcours ont été aménagés pour faciliter l’ascension des marcheurs. Mais avec un dénivelé positif de plus de 500 m, partir à l’assaut du crêt de Chalam se mérite ! © Gilles Lansard / Détours en France

Les épicéas cachent la vue durant toute l’ascension, mais au sommet (1 545 m), la surprise est de taille : un panorama sublime s’ouvre sous nos yeux. Voici les monts du Jura (la Dôle, le crêt de la Neige, le Reculet), la chaîne du Mont-Blanc en arrière-plan, mais aussi les massifs de la Chartreuse et de Belledonne, sans oublier les monts du Bugey ! En regardant vers l’ouest, on comprend l’étagement en escalier des plateaux du Jura. À nos pieds s’étendent deux combes parallèles qui s’allongent en direction de Lajoux : nous allons justement y cheminer à pied en formant une belle boucle oblongue. Mais avant de redescendre, il faut se remplir les yeux de ce paysage doux de monts et de vaux, façonné dès le Moyen Âge par les moines défricheurs de Saint-Claude. Des fermes disperses, bâties en hauteur pour échapper au froid, ponctuent le paysage. Derrière une de ces fermes aux tavaillons déchiquetés, on aperçoit le crêt du Merle. Allons-y ! Nous redescendons par le même chemin, qui passe par le col de l’Encoche (l’aller-retour nous aura pris une heure et demie).

Montagne d'histoire

 D’austères fermes solitaires se rencontrent ici et là tout au long du chemin. Leur isolement rend bien compte de la rudesse climatique de la région
D’austères fermes solitaires se rencontrent ici et là tout au long du chemin. Leur isolement rend bien compte de la rudesse climatique de la région. © Gilles Lansard / Détours en France

Repassant devant la borne au Lion, un mémorial rappelle le souvenir du maquis de l’Ain et du Jura, haut lieu de la Résistance pendant la Seconde Guerre mondiale. Entre 1943 et 1944, 3 000 hommes des maquis se sont réunis en ces lieux pour combattre les troupes allemandes. Chaque année, un rassemblement du souvenir se tient en juillet. Nous avons rejoint la combe qui s’étire paresseusement, alternant prairies verdoyantes et forêts d’épicéas à la robe vert foncé. Bientôt l’emprise de la forêt se resserre. Un petit crochet (100 m de dénivelé) nous mène au crêt au Merle (1448 m). Puis nous continuons jusqu’à l’ancienne école des Closettes, austère construction de pierre isolée sur son mamelon. On songe au temps, pas si lointain, où l’instituteur faisait classe aux enfants de la combe, prenant pension dans une ferme voisine et partageant les conditions de vie des familles paysannes. Le chemin est plus « roulant » tandis qu’on traverse la forêt de la Bretta en direction de la Guienette. À la Mignotte, le chemin quitte les résineux et bifurque vers le col des Salettes. Nous sommes alors au milieu de notre boucle. Le sentier, qui rejoint le GR509 (Grande Traversée du Jura), nous fait longer une autre combe, celle de Malatrait. En chemin, toujours cette ambiance intimiste de combe zébrée de murets de pierre, alternant prés et forêts, ci et là, des fermes caparaçonnées de tôle galvanisée ou de travaillons sont tournées dans le sens des vents dominants (qui correspond à l’axe de la combe) afin de se protéger des rudesses de l’hiver et d’éviter l’accumulation de neige sur les toits. Après le Berbois, le chemin rejoint notre point de départ.

Itinéraire sportif au Reculet et crêt de la Neige

C’est le chaînon le plus oriental, le plus étroit et le plus élevé du massif du Jura. La Réserve naturelle nationale de la haute chaîne du Jura offre des décors aussi variés qu’étonnants, et une vue grandiose sur les Alpes et le lac Léman. Un cadre préservé, idéal pour une grande journée de marche, à condition de faire quelques efforts !

Le long de la ligne de crête, en allant vers le nord sur le GR Balcon du Léman, les ravins sont encore tapissés de neige. Un subtil mariage paysager de poudreuse et de roche qui émerveille les yeux.
Subtil mariage paysager de poudreuse et de roche le long de la ligne de crête. © Gilles Lansard / Détours en France

La Valserine est encore sauvage quand elle passe à Lélex, notre point de départ. Bien chaussés, sac au dos, pique-nique bien emballé et gourde remplie à ras bord, nous longeons un ancien lac glaciaire, désormais asséché. Après le pont du Niaizet, nous piquons à droitevers le plat des Menues et traversons une route goudronnée : l’ascension peut commencer. Le sentier grimpe sec dans le sous-bois. La présence des myrtilliers, le chant aigu d’un roitelet nous donnent un peu d’allant. Bientôt, des soldanelles apparaissent : ces fleurs à clochettes violettes frangées indiquent que la neige a fondu il y a peu de temps. Des bois morts font des chandelles, utilement investies par la chouette chevêchette ou le pic tridactyle, reconnaissable à sa calotte jaune. Quittant la forêt de hêtres, épicéas et sapins, nous atteignons des espaces plus ouverts. C’est ici que vivent la gélinotte des bois et le grand tétras. Ce dernier a disparu des Alpes. Ici, il peut compter sur les zones de quiétude pour vivre sans stress. Ici et là, des pins à crochets, reliques glaciaires que l’on retrouve habituellement en Scandinavie, font leur apparition.

Sur la ligne de crête

L'exercice est rude, mais la beauté du site nous réconforte avec ses parterres de jonquilles saupoudrés de glace et ses odorants pins à crochets.
Grimper la route du Reculet est rude, mais la beauté du site nous réconforte avec ses parterres de jonquilles saupoudrés de glace et ses odorants pins à crochets. © Gilles Lansard / Détours en France

Bientôt, le Reculet (1 718 m) apparaît, coiffé de sa croix enfer forgé. On l’atteint en traversant quelques névés, plaques blanches parmi des tapis de jonquilles. L’altitude a modifié le cycle des saisons : en plaine, les jonquilles apparaissent en mars, ici il faut attendre fin mai ! En été, on croise sur ces pentes des troupeaux de moutons gardés par des patous vigilants. Des goyas (trous d’eau aménagés par l’homme) servent à abreuver les génisses et les brebis montées en estive.

Point de vue grandiose

À 1 718 m, la croix du Reculet contemple le massif et les Alpes.
À 1 718 m, la croix du Reculet contemple le massif et les Alpes. © Gilles Lansard / Détours en France

En haut du Reculet, un panorama grandiose se déploie, justifiant un long arrêt pique-nique. Sous nos yeux, la cluse du Rhône, Genève et son jet d’eau, le Salève au pied du lac Léman qui s’étend de tout son long (on voit bien sa forme arquée)... Le Mont-Blanc sort enfin des nuages. Plus loin, les Alpes bernoises. Par temps dégagé, le regard porte même jusqu’au massif des Écrins, la Jungfrau, le Vercors et la Vanoise. Pas de grand tétras à l’horizon (l’animal est du genre secret), mais quelques chamois qui jouent dans les rochers. Le Reculet est un des sommets qui s’alignent sagement le long d’une ligne de crête. Comme nous suivons celle-ci vers le nord, le panorama se dédouble : d’un côté, les Alpes aux cimes majestueuses, minérales et puissantes, de l’autre le relief plus doux, verdoyant, féminin du Jura. À nos pieds, des gentianes printanières à l’hélice bleu électrique, mais aussi des plantes alpines sur les pentes des sommets dénudés, tel cet edelweiss, qui ne devrait pas avoir sa place dans le Jura ! Bientôt, des combes profondes et étroites forment de petits canyons insolites, tapissés de genévriers. Les pins à crochets font de jolies boules vert foncé. Certains ravins sont encore comblés de neige. Le chemin, qui a rejoint le GR Balcon du Léman, ondule plaisamment d’un crêt à l’autre. Les pins voilent et dévoilent la chaîne des Alpes, comme dans un jeu de cache-cache. Une petite montée grimpe enfin au crêt de la Neige (1720 m), point culminant du Jura. Le sommet est volontiers fréquenté par les Genevois qui, côté suisse, peuvent s’en approcher par une remontée mécanique. De là-haut, on aperçoit le Reculet, solitaire, et tous les autres sommets le long de la crête: la Dôle (1677 m), le Colomby de Gex (1689 m) et le Petit Montrond (1 524 m). La rando sur les hauteurs prend fin : il est temps de redescendre à travers les épicéas et les hêtres. En 1h35 de pente facile, nous avons rejoint Lélex.

Ulrick Tainturier, accompagnateur en montagne

Quelle est la particularité de cette randonnée?

Elle a pour cadre la réserve de la haute chaîne, une des régions les plus arrosées de France. On se trouve dans la partie la plus alpine du massif, avec des portions à plus de 1000 mètres de dénivelé, mais aussi dans la partie méridionale du Jura, qui continue plus au sud jusqu’au lac d’Aiguebelette! Montez au Reculet, c’est un balcon sur le Mont-Blanc et les sommets alpins. En tout, plus de 250 kilomètres d’Alpes sous les yeux !

Quelle flore observe-t-on?

Les pins à crochets font l’âme du massif. On les reconnaît à leur taille assez rabougrie et à leurs cônes portant des écailles en forme de crochet. Plus généralement, on rencontre une mosaïque de microbiotopes : hêtraie, pelouses alpines, canyons rocheux...

Quelques conseils ?

Montez au Reculet le soir du 1er Août (fête nationale suisse) et du 14 Juillet pour admirer les feux d’artifice le long du lac Léman. Attention aux orages de fin de journée en été. Partez tôt pour les éviter. Le brouillard peut aussi envahir les crêtes: soyez attentifs aux bornes de balisage.

Sources

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